Mort, deuil et Cie
Mort, deuil et Cie
Je me suis surpris à lire régulièrement le carnet nécrologique du journal pour voir si j’y figurai. L’humour apparent de cette curiosité peut être une introduction, comme d’habitude au sérieux de l’anecdote. Il est ordinaire en effet que l’hommage rendu au pied de la tombe soit un sommet de l’hypocrisie et surtout une illustration de notre réticence à concevoir le deuil. La perte de l’objet chéri est en effet la condition plutôt joyeuse de notre accès à la vie et entame avec lui un dialogue qui le perpétue (signifiant admirable) pour l’éternité. Jamais il n’a été aussi présent (réel) et éloquent (symbolique) que maintenant. Il lui manque seulement l’imaginaire d’un corps ce dont on peut vouloir le remercier comme si c’était le sacrifice espéré de sa part. Lacan a dû dire quelque part que le deuil n’était jamais que celui de l’objet qu’on avait été pour celui qui vient de mourir. Pas donc l’occasion d’une joie honteuse qu’il faut essayer de dissimuler mais abandon et tristesse, égoïste, aux confins de la mélancolie.
Sacré Lacan ! Jamais nous n’avons tant dialogué avec lui que depuis qu’il est mort et rendu plus éloquent que lorsqu’il était calé dans son fauteuil.