Discours Social et détricotage borroméen (II)
2023

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RUIZ-ELDREDGE Carlos Antonio
Journées d'études

 

Discours Social et détricotage borroméen (II)

Carlos Antonio RUIZ-Eldredge

Le Dénouement

 

Le vieillissement fait partie des lois de la vie. Voici un dialogue qui illustre le ratage par une partie de l’humanité à propos de la spécificité Homme – Femme à la porte d’entrée de cette étape de la vie. Aborder la question depuis la racine pourrait aider la personne âgée à ne céder pas sur son désir.

 

ELLE « Cet échange informel se tient au sein d’un couple…. Le contexte produit du sens. Ce couple, récent, apprend à se connaitre. Et ce mouvement consenti se développe, entre autres, dans des temps de conversation.

Cet homme et cette femme parlent « d’autre chose » et ce faisant se disent l’un à l’autre

LUI

cause toujours… !

LUI

Comment en es-tu arrivée à ces réflexions sur la femme et l’homme dont tu as parlé en Bretagne ? D’où viennent-elles ?

ELLE

Je ne sais pas… c’est un peu comme si tu me demandais pourquoi, comment, je suis qui je suis… d’où cela me vient de réfléchir de telle ou telle manière ?… C’est peut-être plutôt parce que ma manière de réfléchir est celle-ci que j’ai fait le métier qui est le mien. Oui c’est une approche dramaturgique… c’est-à dire que je m’efforce de ne pas me demander « pourquoi » mais plutôt « quel sens cela produit-il » ? Bon, enfant c’est comme cela que je m’avançais. Enfant, je ne l’aurais pas nommé comme ça bien sûr… mais oui, aujourd’hui cela me paraît être quelque chose comme une approche, je ne sais pas… anthropologique ? ou dramaturgique. C’est tout simplement comme cela que je réfléchis. Parce que voilà … ma pensée …. enfin c’est un truc très personnel je ne sais pas comment te dire…. et je ne peux pas accepter que ma pensée se simplifie ou qu’elle résolve quelque interrogation que ce soit, ici sociale ou autre, par un système de classification. En soit qu’est-ce que ça veut dire que « les hommes sont comme si » et « les femmes sont comme ça » ? Rien. Mais ce qu’ils disent, les questions qu’ils posent, ce qu’ils font, ce qu’ils ne font pas, ça, ça m’intéresse, ça stimule ma réflexion… c’est un mouvement qui accompagne ma vie…. je ne me demande pas vraiment d’où cela me vient… parfois, notamment dans ma vie de metteure en scène, des comédiens m’ont posé la question… mon fils aussi… Cela me fait penser à la blague récurrente d’un comédien avec qui j’ai travaillé longtemps et qui est un ami proche. Quand nous échangeons sur des sujets très divers, il me regarde et il dit : « tu sais quoi A. ? Tu devrais faire metteure en scène ! ».

Bon mais tu voudrais que je te « redise » notre conversation de Bretagne… au passage…c’est un peu bizarre de « redire », non ?

LUI 

Tu veux bien que je t’enregistre ?

J’ai l’impression qu’à ton jeune âge tu as découvert une certaine fragilité chez l’homme et la force de la femme ?

 

ELLE

Je ne crois pas avoir découvert ou même pensé cela…Je trouve encore que ça… tu vois ça…. Je n’aime pas beaucoup. Parce que ça c’est encore de la classification. Je ne sais pas ce que cela veut dire « la force de la femme » et « la fragilité de l’homme. » ! Ces généralités ne m’intéressent pas, elles ne m’aident pas à penser. Elles ne peuvent pas nourrir ma réflexion ni mon rapport au monde. Mais je peux entendre… quelque chose dans ta formulation… dans ce que tu nommes de toi en posant cette question, parce que ce sont tes mots. J’écoute pour essayer d’entendre la question que tu me poses en posant celle-ci…Mais, bon, je vois à quelle conversation tu fais allusion. Celle sur les règles. Je me demande… comment nous en étions venus à parler de cela…. en fait c’est plutôt cela qui m’intéresse… mais, allons-y pour l’exercice…

Oui, une femme a mal au ventre tous les mois, tous les mois elle a mal, elle perd son sang.

Et elle sait qu’elle n’est pas en train de mourir. Ce sont ses règles tout simplement. C’est même lié à la fertilité, à la vie.

Quand « ça commence », tu ne le vis pas tout à fait comme ça. Tu as très mal au ventre et tu perds du sang. Tu sais de quoi il s’agit. Et il y a d’abord l’ensemble des aspects pragmatiques. Comment tu fais puisque tu saignes tous les mois. Comment tu fais puisque (dans notre culture en tout cas) tu dois vivre tout à fait normalement. Comme les autres jours. Comme si de rien n’était. Donc, oui, tu commences à apprendre comment faire. Mais par la suite comme cela revient chaque mois, tu découvres ta manière de le vivre. Et ce sont les aspects pratiques qui t’occupent : devoir aller acheter de quoi te changer dans la journée parce que tes vêtements sont tachés et que tu es en répétition, ou en rdv, par exemple. Tu règles avant tout des problèmes pratiques. Le sang est un problème pratique. Il n’induit pas la blessure, et n’implique pas la douleur, la maladie ou la mort. Quand nous sommes des petits enfants, nous tombons, nous nous écorchons, nous avons mal, « ça » saigne. Pour les filles, à ce moment-là, celui de la puberté, cela devient différent.

LUI

Ce doit être très fort ce moment du début de la vie menstruelle ?

ELLE 

Oui… ou pas vraiment. Là encore les expériences sont singulières. A priori, (en tout cas c’était mon cas), ta maman t’a expliqué, tes parents t’ont expliqué, et tu sais à quoi cela correspond. Cette étape initiatique tout à la fois est une part d’une métamorphose et, dans le même mouvement, révèle la complexité de ton rapport à la féminité, à ta féminité. Les mots étant ce qu’ils sont, l’usage est de poser la question à propos d’une jeune fille (chez le médecin par exemple) « elle est réglée ? », « êtes-vous réglée ? »…. ah, il vaut mieux avoir le sens de l’humour !

Pour ma part, cet été-là, j’étais partie en stage d’entrainement sportif. J’avais tout ce qu’il fallait dans ma valise. Maman m’avait expliqué quoi faire, elle m’avait donné du doliprane, ou l’équivalent, au cas où j’ai mal au ventre. Et puis mon entraîneure, était une femme, (j’évite le mot « entraineuse » à cause du double sens et les finales en « eure », je préfère, il s’agit bien du même métier. Au féminin et au masculin). Et la mère de Marie-France, notre entraîneure, était venue et s’occuper de nous. C’était elle qui cuisinait, qui consolait, qui nous redonnait le sourire, c’était un peu la grand-mère de tout le monde. Et elle veillait aussi sur nous car certaines était très jeunes. Il y avait dans ce groupe deux sœurs qui avaient 9 et 11 ans et leur nounou était venue avec elles. Il n’y avait que deux hommes, deux adolescents. Voilà le contexte.

Et dans ce contexte, l’arrivée de mes règles n’a pas généré d’inquiétude pour moi. Juste l’organisation technique avec les serviettes hygiéniques, le fait d’avoir un peu mal. Et après…les collants, le justaucorps, le patinage, la glace, la patinoire. C’est là que j’ai eu mes premières règles, pendant ce stage.

Mais la réflexion à laquelle tu fais allusion, m’est venue après bien sûr … de mémoire, je crois bien que cette réflexion m’est venue le jour où j’ai partagé la vie d’un homme enfin d’un jeune homme, JM. Nous étions tous les 2 des jeunes gens. Et là j’ai découvert ce que j’ai perçu de sa part comme une sorte d’inquiétude liée à son corps, légère, diffuse. Très diffuse, parce qu’il était en bonne santé. Mais enfin, oui, une inquiétude qui s’exprimait ponctuellement : sa peur de la maladie, du sang qui coule, de la douleur ; c’est drôle… parce qu’on apprend aux petits garçons à être forts ! Mais dans la réalité quotidienne, le jeune homme se blesse, son sang coule et…. ce signe de stupéfaction qui vient derrière.

Une femme, rince la plaie, et voilà, tu perds du sang mais tu sais que cela ne signifie pas que tu ne vas pas mourir. Les hommes l’ignorent. Tout simplement. Je crois qu’ils ne le connaissent pas, concrètement. C’est juste ça. Alors ils se sont inventés cette histoire de «être fort », « ne pas faire la fille »…. Et quand ils ont une petite grippe, ils sont à l’article de ma mort ! C’est une blague, mais oui, ils sont inquiets, autrement, dès qu’ils sont malades.

Quand mon fils était petit, je lui expliqué très tôt ce qu’étaient les règles. Parce que je me disais, il peut rentrer dans la salle de bain, si je suis en train de prendre ma douche et s’il voit du sang… je ne voulais pas qu’il ait peur, qu’il se dise « ma maman a quelque chose de grave ». Voilà et donc je lui ai expliqué. Comme je lui avait expliqué « comment on fait les bébés »… je lui ai raconté : « voilà, donc dans le ventre de maman (d’ailleurs, je disais à N. «dans l’utérus de la maman ») chaque mois se forme un petit nid pour accueillir un bébé. S’il n’y a pas de bébé, le petit nid se détache et en se détachant, ça saigne ». Donc, quand il voyait chaque mois que j’avais mal au ventre il disait : « Oh maman tu as ton petit nid ? ». Il trouvait ce petit nid très mignon. Cette complicité autour de quelque chose qui ne concernait que les filles mais dont il connaissait l’existence lui plaisait, il en était fier. J’avais trouvé cela pour l’expliquer à un tout petit enfant. Et j’ai complété quand il a grandi, et j’ai répondu à ses questions.

LUI

Dans cette conversation de Bretagne, tu avais fait un lien avec ce qui s’opère à la ménopause, ce que règle l’homme en lien à la ménopause et le changement chez la femme. L’homme a peur de son image et la femme l’assume autrement…

ELLE

C’est encore autre chose…. Là encore j’entends ce que tu dis, comment tu le dis et je me demande … quelle question me poses-tu en posant celle-ci ? Mais bon, là aussi, je vois sur quelle conversation tu reviens. Oui probablement dans notre conversation de Bretagne étions-nous passés de l’un à l’autre parce qu’on parle beaucoup des règles, on y prépare les filles et que l’on parle peu du moment de la ménopause, qui peut -être très long pour certaines femmes. Mais nous avions parlé de la ménopause au sein du couple, pas en général. Dans le couple, cela concerne deux personnes, c’est la ménopause de deux personnes.

Au sein d’un couple…. C’est la réflexion que je me suis faite en voyant des couples autour de moi vivre ces moments-là… Parce que des amis (hommes) m’en parlaient. Comment certains hommes sont très fragilisés par l’arrivée de la ménopause de leur femme ou de leur compagne… et je ne pense pas que ce soit simplement le fait de dire « Oh, elle n’est plus fertile », non, ce n’est pas ça. Il me semble qu’il y a plusieurs facteurs, un faisceau de facteurs. C’est-à-dire que …à ce moment-là les femmes sont très fatiguées. C’est très fatigant pour le corps. Et parfois la ménopause dure plusieurs années. Oui, il se passe quelque chose qui est violent dans le corps, tu vois ? cette espèce de flux-reflux. En fait c’est plutôt le reflux. On est parfois très fatiguée sans comprendre pourquoi. Et on ne nous explique rien à ce sujet…. oui, on n’explique que peu aux femmes et aux hommes, les évolutions hormonales, l’espèce d’ascenseur hormonal, le temps que cela prend, les poussées dépressives etc… Cela entraine des modifications physiques, physiologiques, des évolutions très rapides dans l’humeur, le comportement, toutes sortes d’effets, etc…..

Or on en parle très peu avant que cela n’arrive. Autant tu es préparée, toute jeune fille, adolescente, à tes premières règles autant personne ne te parle pas de la ménopause. Tes parents, ta mère ne t’en parlent pas ou très peu. En tout cas personne ne t’y prépare. Pas même les médecins si ce n’est par allusion ou pour te demander quand étaient tes dernières règles… Bon, peut-être est-ce en train de changer…. Mais, sérieusement ? tout reste à faire….

Il n’y a qu’au moment où tu y es confrontée que toi-même, tu t’interroges. Tu te demandes comment c’était pour ta mère, ta tante etc…. Aujourd’hui on organise des journées, c’est précieux, des journées autour des règles et de la sexualité féminine pour les mamans et leurs filles au moment où les jeunes filles ont leurs premières règles. Une amie qui a fait ça avec chacune de ces filles m’en a parlé. Elle m’a dit à quel point c’était « formidable », mais je lui ai demandé d’inciter cette association à faire quelque chose sur la ménopause. Ils ont pensé au début mais pas à la sortie.

La ménopause se vit dans la solitude, ou plutôt … elle provoque un isolement. Beaucoup parce qu’elle n’est pas nommée… ou par défaut.

Donc…. pour revenir à ta question, et à ce qu’il se passe dans un couple. C’est une première fois pour l’homme autant que pour la femme. Et c’est long. On n’oublie trop souvent cet aspect. La préménopause dure plusieurs années et la ménopause peut durer plusieurs années également. Ça fait beaucoup ! J’ai vu des couples, autour de moi, vivre ce moment et surtout souvent mes amis-garçons venaient me parler et me demandaient : « c’est compliqué, qu’est-ce que je fais ? » … Il y a la question du corps, de « l’humeur », de « la baisse de la libido » etc.… et là… je crois bien que c’est loin de n’être que cela, de se réduire à ça. Cela se fait à deux et ce qui est produit est produit des deux côtés. Je veux dire que cela se fait à deux. …. C’est-à-dire pour l’homme et la femme. Ils rentrent dans la ménopause avec tout ce qui se raconte sur la ménopause : « elle ne va pas plus avoir envie de faire l’amour », « plus envie d’être avec lui », « elle va être désagréable », « elle va devenir vieille », « elle va être dépressive », et tout ce que la société raconte de stupide là-dessus…. Et un homme, lui comme les autres, est comme « marqué » culturellement par ces assertions qui disent la ménopause « par défaut ». Tout comme sa compagne l’est.

En parlant de « marquage », c’est autre chose mais puisque le mot est là, j’y pense, la femme ménopausée subit une sorte de « marquage » sociétal et dans un couple le marquage atteint également le couple.

Il faut quand même avoir une réflexion et une intelligence dignes de ce nom, une ouverture d’esprit véritable pour bagarrer contre les stéréotypes, notamment autour de ce sujet et pour pas rester tous seuls quand ça vous arrive.

Bref, un jour, un ami me parlait de la ménopause de sa femme. (JM, le premier garçon avec qui j’avais vécu…, c’est amusant…).

Il me disait « je ne sais pas quoi faire ». Cela me paraissait fou l’attitude de ce garçon intelligent. Il disait, « comment se fait-il que la médecine n’ait rien prévu ? » Et enfin : « c’est terrible, c’est à dire, la femme arrive à la ménopause et tout d’un coup sa peau se relâche, ses cheveux changent, le corps change ! Ce n’est pas possible ! et la médecine n’a rien prévu !!! ». Je lui ai répondu que la médecine occidentale était de longue date le domaine des hommes. Comment se fait-il que l’on n’ait rien trouvé pour prendre en compte les règles douloureuses ? Les médecins depuis tellement longtemps disaient aux femmes «non, non c’est une idée que vous vous faite les règles elles ne sont pas douloureuses. Il n’y a aucune raison pour qu’elles soient douloureuses ». De même qu’ils s’étaient approprié la naissance, l’accouchement. Etc…

Et JM me disait très naïvement, « elle devrait prendre des hormones pour retarder les effets, mais bon après c’est vrai ce n’est pas sans risque… » etc… Bon, dans la mesure où je connaissais cet homme un peu, je percevais son angoisse. Il me questionnait, il demandait des solutions et de fait il ne parlait que de lui-même. De sa peur, de ses peurs et de la panique qu’il s’efforçait de réfréner.

C’est un homme très angoissé par sa mort, par son vieillissement. Et il m’est venu cette idée : quand il voit son visage à elle…. C’est ça…. C’est le miroir à deux, il voit l’autre et il se dis « ah, mince elle a vieilli », « mince, il est vieux ». Alors j’ai tenté de lui répondre « oui c’est inévitable, toi aussi tu vieillis ». Et je pensais : « En fait, tu vois le vieillissement sur le visage de l’autre et tu dis non ça ne peut pas être mon visage ; et si cela t’angoisse trop, et bien tu penses à « quitter » ta femme et tu préfères avoir comme reflet dans le miroir, une femme de 25 ans. Tu te vois comme tu la vois. Elle est ton miroir, je crois que dans un couple, elle est ton miroir ».

Ça joue terriblement. Et là, je le voyais et je l’entendais, lui, et je me disais « mais c’est toi qui est en train de passer par le vieillissement et non, JM, on ne peut pas trouver un médicament pour qu’elle arrête de vieillir, pour que la vieillesse cesse d’être visible, perceptible pour toi ». Tout à coup, le vieillissement surgissait devant lui parce qu’il percevait le vieillissement de la femme en face de lui (d’ailleurs son épouse est un peu plus jeune que lui). Mais c’est une réalité. Le corps de l’homme vieillit plus tard, parce que la femme, avec la ménopause, subit la fonte musculaire, le relâchement cutané etc…. Ces transformations sont là, immédiatement, en tout cas rapidement.

Alors, oui, en tant que femme, tu luttes, tu t’efforces de limiter les dégâts, de faire bonne figure, tu peux lutter, tu peux lutter en permanence, tu peux faire ce que tu veux mais les hormones font leur travail et tu es confrontée au vieillissement tous les jours. Chaque matin surtout.

Dans un couple, les effets et la durée de la ménopause sont si peu connus ! Et dans la mesure où ils s’étalent dans le temps, si difficilement partagés ! Parfois, il me semble qu’il arrive que l’angoisse et la peur de l’homme soient soudain plus fort que l’amour, qu’elles obscurcissent son entendement, que l’angoisse soit insupportable.

Au moment où l’homme perçoit le vieillissement de sa compagne soit il le chérit, il l’aime, soit, en miroir, cela réveille son angoisse. Et son angoisse grandit.

C’est comme ça que je m’explique la banalité des séparations autour de la cinquantaine, et ces hommes qui s’élancent, se jettent « à corps perdu » dans une nouvelle histoire d’amour. Ces hommes qui quittent leur compagne pour aller vivre avec une femme plus jeune, très jeune parfois. Et voilà, les voilà délivrés de l’image fatale, dans le miroir leur peau est lisse, bien tendue, l’avenir est là à nouveau, leur vie « redémarre ».

Je me l’explique par le fait que leur inquiétude, leurs peurs, leur angoisse sont plus fortes que tout, elles décident pour eux. Le miroir décide pour eux. Leur reflet pense à leur place…

Ce sont des hommes que… j’ai juste envie de les mettre en cause à cet endroit-là, en leur disant « émancipe-toi de ton angoisse, tu ne peux pas accepter d’être assujetti à ton angoisse à ce point-là ! ». Mais, oui, la fuite, c’est aussi une manière de s’affranchir… J’ai envie de penser que l’affranchissement pourrait être plus créatif, plus reluisant, non ?

Cet affranchissement créatif c’est une bonne piste, quel que soit notre âge. Mais à ce moment-là – de la cinquantaine-, plus encore. Quand tout d’un coup il est plus que tout nécessaire pour certains hommes de vivre avec une toute jeune personne, quand il arrive qu’ils quittent brutalement femme et enfants etc . Et cela n’empêche pas qu’advienne une histoire d’amour véritable et harmonieuse d’ailleurs. Heureusement. Sinon c’est se sauver par une espèce d’acte de vampirisme. Et ce n’est qu’un sursis.

C’est une sorte de tentative de résolution. Ils doivent à tout prix « transformer l’essai ». Leur angoisse reste présente et d’autant plus qu’à partir du moment où ils ont quelqu’un de très jeune en face d’eux, c’est une course contre la montre. Leur vieillissement sera de plus en plus présent et le miroir toujours plus nécessaire. Ils se réduisent au reflet d’eux-mêmes. C’est assez pathétique. Et si l’amour est du voyage, ils peuvent enfin s’apaiser.

Ça me fait penser à l’histoire de Blanche Neige, la Reine devant son miroir magique : « miroir, miroir, dis-moi qui est la plus belle ? ». C’est drôle, en fait la Reine de Blanche-Neige est un homme !

LUI

L’étape du premier narcissisme pourrait être corrélé à l’assomption par le sujet de sa maturité ou pas.

ELLE : Ca serait intéressant effectivement de voir si c’est corrélé chez les hommes avec certaine fragilité de la toute petite enfance, être corrélé à un certain type de comportement avec cette fragilité à l’arrivée du vieillissement chez un couple et un certain degré d’angoisse et de fragilisation.

LUI.

C’est complexe car l’homme cherche dans la femme son phallus, et donc le vieillissement fait que le phallus se dérobe…

ELLE

Je te laisse la responsabilité de ce raccourci, de cette formulation…

C’est un moment qui, en tant que femme est une véritable étape de vie, une étape de la vie d’une femme. D’autant que nous vivons tous plus longtemps.

Je me demande… l’espérance de vie des femmes est supérieure… l’épreuve de la ménopause les prépare-t-elle à aborder la vieillesse….

Qu’en est-il au sein des groupes de différents mammifères ? Comment cela se passe-t-il dans les sociétés animales ? Pour certaines espèces de cétacés, comme chez les êtres humains, l’âge de la ménopause, n’est pas un caractère évolutif. Pourquoi ? disparition du labeur reproductif, maintien des facultés et… voici qu’apparaît un individu indispensable au corps social : la passeuse, celle qui peut librement et intelligemment assurer la transmission. Les individus mâles, eux sont toujours à la tâche. Pour les autres, mammifères, il semblerait que la question ne se pose pas, sortir du cercle reproducteur coïncide avec la perte des facultés utiles (forces, tonicité musculaire, endurance) et hop sortie de route. Chez les mammifères la question ne se pose pas parce que les femelles meurent à l’âge où elles ne seraient plus ou bien ne sont plus fertiles.

Le fait est que, j’ai bien l’impression que les femmes acquièrent une indépendance à partir de là et que sont de plus en plus nombreuses celles qui ne veulent même pas entendre de vivre avec un homme. Elles ont une vie amoureuse, elles ont une vie sexuelle et revendiquent un certain égoïsme et choisissent leurs engagements. Comme les orques, en mieux.

Et si, pour répondre à ta remarque, je te parle de moi, alors oui, le fait de ne pas être plus le phallus d’un homme ça été pour moi merveilleux, une vraie liberté. Être un trophée me pesait ; me prêter à ce jeu me consternait. Aujourd’hui, je n’empêche pas l’autre de me brandir mais, cela ne me regarde pas.

LUI 

C’est une recherche mutuelle de l’être et de l’avoir

ELLE

Un peu court, jeune homme…

 

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