Formation de l’inconscient
2022

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METZ Bénédicte
Journées d'études

Formation de l’inconscient

Par pudeur sans doute (parce que l’inconscient est obscène), je n’ai pas été plus loin que de rappeler l’aphorisme de Lacan « il n’y a pas de formation (j’ai omis « de l’analyste »), il n’y a que des formations de l’inconscient » et de demander que l’on m’en indique la référence (merci à celui qui voudra bien me la préciser). Ce rappel m’était soufflé par la citation faite par Roland Chemama de cette autre formule de Lacan que « ce qui se transmet, c’est un style ». Le style en effet, c’est ce qu’un sujet fait des formations de son inconscient.

Ce que j’hésitais à dire, c’est que si loin que soient poussées les élaborations théoriques dans nos échanges, c’est toujours par les formations de l’inconscient de chacun que je suis enseignée comme analyste. J’en retiens les ratés, les lapsus. De même que des journées sur la fin de la cure j’ai retenu l’éloquente « panne » de notre collègue Roussan, de ce week-end je retiendrai l’acte remarquable de Thatyana, notre virtuose du noeud, projetant à l’écran trois ronds superposés pour nous parler de l’usage du noeud borroméen. Quoi de plus enseignant que ces actes, pour leurs auteurs d’abord, sur leur désir, mais pour leurs auditeurs sans la présence desquels ils n’auraient pas lieu, sur les limites de la connaissance et le lieu du savoir dans notre champ. Ces actes ont une structure que tout le Séminaire sur les Formations de l’inconscient s’acharne à formaliser dans un graphe qui deviendra dans les Ecrits le « graphe du désir ». L’enseignement (l’acte d’enseigner comme celui d’être enseigné) obéit à cette structure qui commande l’effet de sens, la même que celle du mot d’esprit, qui n’est autre que celle de l’inconscient. Et de quoi d’autre l’analyste doit-il être instruit si ce n’est de cette structure ? Celle dont Lacan n’a cessé de préciser le fonctionnement tout au long de son enseignement.

C’est cette structure aussi qui fait et explique que nous ne butons pas sur les mêmes points d’un texte, comme le faisait remarquer Cyrille Noirjean, ce qui fait la richesse et la nécessité de nos échanges. Cette butée propre à chacun est encore une formation de l’inconscient, et comme telle à déchiffrer.

De même, face à la difficulté de mettre en oeuvre une analyse aujourd’hui (soulignée par Anne Joos) du fait de la compacité du discours social dans lequel les sujets sont pris, et même dans la confrontation au militantisme qui n’en est que la revendication pétrifiée (ce dont a témoigné Alexandre Beine), nous n’avons pas d’autre porte d’entrée ni d’autre instrument que ces formations de l’inconscient, qui seules permettent la rencontre avec un sujet, à son grand étonnement le plus souvent, son soulagement aussi même s’il peut être mêlé d’angoisse, et qui est toujours son premier enseignement sur ce qu’est et ce que peut la psychanalyse.