« Faut-il être psychotique pour vraiment aimer ? »
J’avais proposé cette question…
Je ne vais pas tout de suite y répondre mais vous donner tout de même un bout de la réponse pour commencer, car ce titre m’est venu en écho d’une phrase que Marcel Czermak répétait régulièrement :
« Il n’y a de vrai couple [disait-il] que quand au moins un des deux partenaires est psychotique”.
Vous voyez tout de suite, à suivre cette phrase, comment la question de « l’amour dans la psychose » ou plutôt dès que l’on met la psychose dans l’amour, cela vient nous informer sur l’amour ou sur le vrai amour.
Je dis « vrai amour » car à chaque fois que je l’entendais prononcer cette phrase, je me posais la question du statut du « vrai », puisqu’il parlait de « vrai couple ».
Ce serait quoi un vrai couple ? Et que voudrait dire : aimer vraiment ? j’y reviendrai, comme sur cette proposition de Marcel Czermak qui semble tout de même aller à l’encontre de tout un abord liant psychose et amour sous le sceau de l’échec, du ratage.
Cela passe bien sûr par ce vous connaissez par cœur, à savoir les quelques indications de Lacan à ce sujet, et tout particulièrement ces deux-là :
Celle dans le séminaire III où il considère l’amour dans les psychoses comme mortifère[1] et cette conférence à l’université de Yale dans laquelle il parle de faillite de l’amour dans les psychoses[2].
Pourtant, si l’on reprend cette dernière conférence, Lacan y pose également la question de savoir ce qui mène une personne à être psychanalyste et comment, pour sa part, c’est le fait, comme il dit, que ça ne marche pas entre un homme et une femme[3] qui l’a mené à la psychanalyse. « Il est certain [dit-il aussi] que je suis venu à la médecine parce que j’avais le soupçon que les relations entre homme et femme jouaient un rôle déterminant dans les symptômes des êtres humains. Cela m’a progressivement poussé vers ceux qui n’y ont pas réussi, puisqu’on peut certainement dire que la psychose est une sorte de faillite en ce qui concerne l’accomplissement de ce qui est appelé amour ».
Donc « mortification », « faillite » et pourtant ce par quoi il faut passer pour comprendre quelque chose de l’amour car en effet, ce ne sont pas les psychanalystes ou les médecins qui vont dire ou apprendre aux patients ce qu’est l’amour.
Comme à la fin de la fable de La Fontaine, nous pourrions dire que la folie est condamnée à guider l’Amour[4].
Il est en effet des plus habituels de lier folie et amour. Ça va de « l’amour fou » d’André Breton au texte de Stendhal sur le sujet- « De l’amour » – dans lequel il évoque l’amour comme, dit-il, « une sorte de folie » dès la préface et plusieurs fois dans le texte.
Mais si l’amour rend fou et peut nous faire faire n’importe quoi, l’amour ne rend pas pour autant psychotique.
Roland Barthes, avec ses propres mots et dans son champ, ne disait sans doute pas autre chose quand il demandait : « imagine-t-on un fou amoureux ? Nullement. Je n’ai droit qu’à une folie pauvre, incomplète, métaphorique : l’amour me rend comme fou (…) Ma folie, simple déraison est plate, voire invisible » (…) Le sujet amoureux est traversé par l’idée qu’il est ou devient fou mais ne l’est pas de pouvoir le dire. Conscient de cette folie, tenant discours sur elle »[5].
Alors, c’est la question : comment aime-t-on dans la psychose ? Comment aime un psychotique si ce n’est pas follement ?
L’un des modèles ou paradigmes, pourrait-on dire, de l’amour dans la psychose est bien sûr l’érotomanie qui se résume dans ce postulat : « il m’aime » ou « je suis aimée par un tel… par l’autre » et que de Clérambault a si magistralement déplié à partir de 1920. Le cas de Léa Anna lui avait ainsi permis d’expliciter la position de l’érotomane comme s’inscrivant dans la « conviction d’être en communion amoureuse avec un personnage (plutôt d’un rang plus élevé), qui le premier a été épris, et le premier a fait des avances »[6].
Puisque Lacan- et tout particulièrement dans « les non dupes errent » [7] -fait équivaloir amour et transfert dans les suites de Freud qui parlait de vrai Amour à propos du transfert, cette érotomanie est également l’une des modalités d’expression du transfert psychotique qui, comme l’indiquait encore une fois Marcel Czermak, est sans résistance, irrésistible[8].
Là où par l’ambivalence névrotique viennent se lier et se tisser des éléments non dissociés, l’hainamoration, le psychotique lui aime vraiment ou hait vraiment, c’est-à-dire dans le réel.
Au-delà de la figure de l’érotomanie, il me semble que nous pourrions préciser la façon dont peut se présenter l’amour dans la psychose en disant qu’il s’agit de faire Un. C’est, vous me direz, précisément la position érotomaniaque, celle de ne pas distinguer objet et sujet.
Mais il faut ajouter que dans l’érotomanie, faire Un avec l’objet est une promesse. Un jour viendra…
L’objet d’amour est là mais souvent tenu à distance. Ce qui s’appelle chez de Clérambault « le platonisme ». Même s’il n’en faisait pas un critère discriminatoire et le maintenait pour une donnée accessoire, de Clérambault indiquait tout de même que ce platonisme, cette distance vis-à-vis de l’objet, était réellement plus fréquent chez les érotomanes que chez l’homme dit normal.
Je pense à ce sujet à une patiente que je connais depuis plusieurs années et qui est amoureuse dit-elle « des chanteurs et des psychiatres ». Ces deux catégories, les chanteurs et les psychiatres, ont pour point commun selon elle d’être très beaux et très riches. Ce n’est pas une érotomanie pure dans le sens où elle n’évoque que très rarement le postulat qu’elle serait, elle, aimée. Toutefois, elle ne cesse de maintenir ses objets d’amour à distance.
Elle me dit souvent : « j’aime tel ou tel chanteur, je vais me marier avec lui » dit-elle, mais elle complète toujours sa phrase et sans aucune tristesse en disant : « mais je ne le verrai jamais ».
On pourrait dire que c’est mieux pour tout le monde. La preuve étant que si elle croise dans la rue, comme cela lui est arrivé il y a peu de temps, un marchand de fruits à la sauvette qui ressemble, dit-elle, à un chanteur, elle le serre dans ses bras, refusant de le lâcher jusqu’à intervention de passants et de la police.
Elle maintient également à distance les psychiatres : « je veux me marier avec Dr untel » « … dans mes rêves » ne manque-t-elle jamais d’ajouter à sa phrase.
Je ne fais pas exception à son effort de mise à distance (je vous signale d’ailleurs que c’est l’Effort qui distingue chez de Clérambault la passion normale du délire passionnel[9]) :
Si je ressemble, selon elle, à tel chanteur, celui-ci ne fait pas pour autant partie de ses préférés, et comme elle me disait récemment : « heureusement pour vous, vous n’êtes pas psychiatre ».
Encore plus que dans l’érotomanie, c’est peut-être dans ce que Marcel Czermak a appelé « psychose unienne » que l’on retrouve un des abords spécifiques, il me semble, de l’amour dans les psychoses.
Je ne vais pas expliciter cette question. Je vous renvoie essentiellement à l’article « Un lien conjugal réussi »[10] et au cas déplié à cette occasion, celui de Madame Utile, cette femme qui disait de sa relation à son mari qu’elle l’avait choisi dès son enfance : « C’est un amour réel, complet, parce qu’on a grandi ensemble. Il fait partie de ma vie (…) j’étais pas pressée de me marier, j’attendais mon mari. Quand j’étais à l’école, je m’exerçais à ma signature à son nom ».
Si bien souvent l’érotomanie peut se stabiliser dans l’espoir un jour de faire Un avec celui ou celle qui a déclaré sa flamme, dans la psychose unienne faire Un n’est pas une promesse. L’unification se réalise.
Il s’agit dans ce type de tableau de trouver abri exclusif dans l’Autre. De faire Un dans l’Autre.
Le cas princeps de psychose unienne proposé par Marcel Czermak concernait la situation d’une femme. Marcel Czermak pensait en effet alors que ces psychoses se rencontraient exclusivement chez les femmes, mais les hommes ne font pourtant pas exception à ce type de tableau clinique.
A ce propos, je vous conseille de relire sous ce prisme l’Hyperion d’Hölderlin dans lequel il s’agit pour Hyperion de faire Un dans l’Autre, mais pas seulement dans l’autre féminin incarné par Diotime[11].
Je pense également à un patient que je rencontre toujours aujourd’hui. Il est veuf depuis 1994. Il avait rencontré sa femme à l’âge de dix-sept ans.
Il dit d’elle : « elle était tout pour moi, la mère, l’épouse, l’amie. Moi, j’étais totalement effacé ».
Très vite après leur rencontre, Ils se sont installés dans un studio dans lequel ils vécurent en couple pendant vingt ans. Ils étaient à l’époque tombés sur l’annonce de ce studio, parfait pour eux selon lui, l’annonce indiquait seulement : « Quartier de Bastille. Idéal pour une personne ».
A la mort de sa femme, il développe entre autres un délire de persécution et il sera très souvent par la suite hospitalisé. Maintenant, ça fait quinze ans qu’il n’est plus à l’hôpital, Il reste toutefois en institution, et il vient depuis des années me voir tous les matins. « J’ai besoin de venir dans votre antre » me dit-il.
Il y a des traces de cet aspect de psychose unienne, non seulement dans le transfert comme vous l’entendez, mais également à l’évocation de sujets essentiels, notamment lorsqu’il pense à sa mort prochaine, il me dit, c’était cette semaine : « ma femme, elle est toute seule dans sa boite. Il n’y a pas de place mais j’aimerais y être. Ça doit être cher ! Et puis, j’aimerais être mis sur sa plaque à elle, là où y a son nom ».
Concernant le cas de Mme Utile, Marcel Czermak avait parlé de « psychose passionnelle sans passion ».
Faire un avec l’Autre n’est donc pas du côté de la passion ; passion qui, elle, serait plutôt, par moments, du côté de la mort réciproque[12]. Lorsqu’on aime vraiment quelqu’un pour de bon, disait Charles Melman, ça ne peut être que dans le désir de vouloir le tuer.
Jean-Luc Nancy en reprenant cette question de « à la folie » dans sa petite conférence sur l’amour indiquait bien que « l’idée de vouloir mourir ensemble veut dire que la mort serait le seul moyen d’être complétement ensemble »[13]. Je vous renvoie également au très beau texte « Lettre à D », cette lettre adressée par André Gorz à sa femme atteinte d’une maladie incurable et avec qui il s’est suicidé[14].
Mais revenons à ces psychoses uniennes qui sont effectivement des tableaux cliniques plutôt asymptomatiques, dans lesquels une pacification est possible sous la forme du UN, sous l’abri de l’unification avec l’interlocuteur.
Vous voyez comment la façon de placer ou d’épingler la psychose dans la recherche d’un abri unique dans l’Autre en amplifie considérablement la fréquence.
Lucien Israël allait en ce sens en disant qu’il y avait beaucoup, plus de cas de psychose que l’on ne pense puisqu’il rangeait sous le signe de la psychose « tous ceux qui sont prêts à se donner corps et âmes à quelqu’un »[15]. Le nom en question pour le névrosé sera celui du père, et pour le psychotique celui d’un autre.
La jeune patiente, que j’évoquais tout à l’heure, amoureuse des chanteurs et des psychiatres n’aspire qu’à une chose : trouver abri sous le nom générique de « gothique », dénomination qui abolit tous les autres noms… Une fois telle ou telle personne repérée comme gothique, cette dénomination se substitue à tout autre nom. « Les gothiques me rendent heureuse », « C’est beau le gothique », « Je veux vivre avec les gothiques mais je ne sais pas où ils sont ». Un cas de psychose unienne ratée pourrait-on dire, comme il en existe sans doute beaucoup.
Ce type de tableaux comme ceux de psychose unienne, qu’ils soient plus ou moins asymptomatiques, ouvre la question de savoir comment l’on peut repérer des tableaux parfaitement psychiatriques mais qui n’ont jamais été pour autant répertoriés dans le trésor classique des aliénistes. Il y a là tout un champ qu’une lecture analytique de la psychiatrie permettrait d’explorer.
Selon, par exemple, la topologie de l’objet, la distance ou le positionnement de l’objet vis-à-vis de l’autre, ça ne donnera pas les mêmes tableaux cliniques :
La psychose unienne n’est pas l’érotomanie, qui n’est pas le mythe d’Aristophane ou le syndrome de Cotard (quand celui-ci fait Un avec l’univers).
Il s’agit à chaque fois de bien fixer les cordonnées nous permettant de les repérer, pour ne pas, par exemple, prendre des situations de psychoses uniennes pour de (simples) chagrins d’amour.
A ce sujet, il me semble que nous pourrions indiquer que l’amour dont rêve habituellement le névrosé est celui qui se présente majoritairement dans la psychose :
Le névrosé peut en effet espérer faire un avec l’autre, mais cela fait toujours deux pour lui. C’est d’ailleurs bien souvent son drame.
De même, pour reprendre cet exemple classique de l’érotomanie, le postulat qui signe l’érotomanie -être aimé, être choisi par l’autre -est fréquemment une position souhaitée, espérée par beaucoup.
La psychose nous montre l’aspect totalement contre-intuitif de tout ce qui peut sembler aller de soi dans l’amour : Avoir le sentiment que l’autre lit dans nos pensées, qu’il n’y a pas besoin de se parler ou que l’autre peut finir nos phrases… Tout cela est battu en brèche dans la psychose :
Pensons à l’automatisme mental, aux phrases interrompus de Schreber ou encore au langage d’organe du schizophrène. D’ailleurs, les exemples prélevés chez Tausk par Freud à ce sujet dans son article « L’inconscient » concernent la déception amoureuse de la jeune Emma vis-à-vis de son amant.
Je vous donne ce dernier exemple d’un patient qui, évoquant son rapport aux femmes, en montre toute la subversion psychotique : « Quand je croise le regard d’une femme je louche, je me mets à loucher automatiquement. Je suis connu pour cela dans tout Paris ».
Il me dit encore : « Avec les femmes, surtout quand on parle de choses personnelles, il y a des phrases en pointillé. Je ne sais pas comment les compléter ».
Avant de finir, je dirai un mot à propos de la sexualité dans la psychose, puisqu’il sera question de ce thème de la sexualité cet après-midi.
C’est presque encore un autre sujet puisque couple, amour, sexualité ne relèvent pas nécessairement des mêmes catégories.
Dans le champ psychotique, il y a peut-être du rapport sexuel mais, en tout cas, il y a aussi des relations sexuelles. Pas toujours, pas nécessairement. Disons qu’il est bien difficile d’établir quelque chose de définitif à ce sujet. Toutefois, j’aimerais indiquer deux points qui me semblent importants quand on parle de sexualité et de psychose :
Tout d’abord, pour rester dans le droit fil de ce que je disais, quand une personne arrive (vraiment) à faire un avec l’Autre, alors il n’y a plus beaucoup de sexuel qui entre en jeu.
C’est l’une des raisons qui peut expliquer, dans certains cas seulement, pourquoi le psychotique peut parfois être très à distance de ces considérations et de la question sexuelle.
Mais dans les cas où il y a des relations sexuelles, je dirais alors que la sexualité est fréquemment une conduite à risque pour la psychose. C’est plutôt, bien souvent, « le sexe et l’effroi », pour reprendre ce titre de Quignard[16].
Pour plusieurs raisons : tout d’abord, l’on connait bien les déclenchements de psychose faisant suite à un rapport sexuel. Pour prendre un exemple des plus classiques, je vous renvoie au cas de Freud de paranoïa en contradiction avec la théorie dans lequel une femme, après avoir couché avec son collègue, pense avoir été photographiée pendant l’acte sexuel et développe par la suite tout un délire paranoïaque[17].
Plus près de nous- je ne sais pas si vous avez lu cela dans la presse récemment- je pense à ces cas, autant d’hommes que de femmes je crois, qui après un rapport sexuel présentent des épisodes transitoires d’amnésie, alors même que les examens ne montrent aucune anomalie ni activité épileptique. Ce serait sans doute intéressant de se pencher sur ces cas d’amnésie, notamment pour savoir si elle touche aussi l’identité de ces personnes et pas seulement la mémoire épisodique. Je ferme la parenthèse.
Mais sans pour autant être facteur de déclenchement des psychoses, la sexualité peut être un élément hautement déstabilisant. Notamment dans ce que cela appelle comme rencontre avec le corps, avec la jouissance phallique.
Cette prudence est bien difficile à faire entendre à l’heure actuelle, à une époque où la psychose est intégrée dans le champ de la santé mentale et qu’il ne s’agit plus tant de parler désormais de psychotique que de personnes dites handicapés psychiques.
Intégré au champ du handicap, le psychotique peut désormais revendiquer une sexualité, qui plus est épanouie, puisque comme tout handicapé il s’agirait désormais de compenser toutes les conséquences de son handicap. C’est tout le débat qui a existé il y a quelques années, en 2000, sur les assistants et assistantes sexuelles censés intervenir notamment dans les institutions pour handicapés.
L’accompagnant ou assistant sexuel s’adresse à des personnes « qui n’ont pas la maitrise de leur corps », comme il est dit, et à qui est assuré un contact sensuel et/ou sexuel.
C’est un débat qui n’est plus d’actualité en France puisqu’il y a eu un avis défavorable en 2013 du comité consultatif national d’éthique, mais la question peut revenir et c’est à l’œuvre dans d’autres pays comme en Suisse romane.
Il existe aujourd’hui encore des pratiques qui se font dans ce domaine-là, notamment avec l’APPAS (faites attention de ne pas vous tromper, ce n’est pas la passe lacanienne que vous connaissez). C’est l’association pour la promotion de l’accompagnement sexuel qui propose, par exemple, à Lyon des prestations sexuelles tarifées pour handicapés.
En tout cas, il y a ce mouvement généralisé de pousse à la sexualité qui est très bien entendu par les patients et non sans angoisse. Je pense à ce patient qui me disait concernant son appartement et la façon dont il avait été meublé : « si on m’a mis un lit double, c’est que je suis bien obligé de le remplir ».
Vous voyez comment dans la psychose quand il s’agit d’amour, il ne s’agit pas de faire semblant ou plutôt d’avoir affaire à du semblant, qui est le mode le plus habituel de rapport à l’objet amoureux dans la réalité.
Le psychotique aime vraiment, dans le sens d’aimer dans le réel, et bien souvent dans un collage à l’objet… ou pire.
A ce sujet, je vous rappellerai cette phrase de celui qu’on appelait « le cannibale japonais » (Issei Sagawa), décédé en novembre dernier, et qui avait en 1981 tué, dépecé et mangé une camarade néerlandaise. Il disait, tentant d’expliquer son acte : « Manger cette fille, c’était une expression d’amour, je voulais sentir en moi l’existence d’une personne que j’aime ».
Si l’amour est l’operateur de la cure, dans le sens où l’amour, comme le transfert, est ce qui porte vers le supposé savoir, le plus important, me semble-t-il est la place que l’on fait au psychotique, et une place qu’il s’agit de garantir :
La patiente amoureuse des chanteurs et des psychiatres me dit : « si un jour vous partez, je me jetterai par la fenêtre ». A noter qu’elle l’a déjà fait, du quatrième étage, il y a plusieurs années à la suite d’une rencontre sexuelle ratée.
Cela me faisait penser à ce moment du séminaire sur le Transfert où Lacan dit que l’analyste est « possédé d’un désir plus fort que (celui) d’en venir au fait avec son patient, de le prendre dans ses bras, ou (justement) de le passer par la fenêtre… Cela arrive… Dit-il pourtant.[18]
Alors, et je finirai par cette question : Au même titre qu’il n’y a de vrai couple que si l’un des deux est psychotiques, est-ce qu’il n’y a de vrai transfert dans la cure que si l’un des deux-je ne vous dis pas lequel- est psychotique ?