Ce qui m’a beaucoup intéressé c’est cette disjonction de l’amour et de la haine : plus d’hainamoration. L’amour, dans le sens de l’Eros cède le pas à la haine… ce qui sème le trouble dans le comportement amoureux ! Autrement dit plus de pacification des rapports Homme/femme par l’Eros, plus de rencontre possible, mais c’est l’apparition de la haine de l’autre en tant que la dimension de l’altérité saute.
Il me semble que tu fais découler cette disjonction de la promotion de l’égalité homme femme qui a pris le pas dans le discours dans lequel nous sommes pris (néo libéral). Ainsi le désir serait lu du côté de la manifestation d’une domination de la femme par l’homme et serait alors rabattu à sa dimension de rapt de l’autre : le viol. Le désir ne serait plus pacifié par la dimension du semblant mais vécu dans sa dimension réelle d’agression dont il faudrait demander justice… Cela corrobore le fait que le discours capitaliste n’aurait pas structure de discours… Réfutation du symbolique (qui met en place la dimension subjective RSI) et produit le déchaînement du réel.
Lacan parle dans Encore de la Haine solide qui s’adresse à l’être. Or l’amour dit-il ailleurs s’adresse du semblant. S’il n’y plus de semblant alors il n’y a plus d’amour (au sens de l’Eros dans son articulation avec le manque à être) , mais de la haine qui s’adresse, vise l’être ou plus justement l’autre dans l’être, en tentant de faire tenir un être « plein ». Il me semble que c’est le joint entre la revendication égalitaire et la haine : tout ce qui peut faire surgir l’autre/ la dimension de l’Autre est promoteur de haine, au sens ou l’autre témoigne de ma propre incomplétude.
Alors, pourquoi les femmes plus particulièrement ? Parce qu’on pourrait penser que les hommes eux aussi soient embarqués dans ce phénomène lié à la structure ?
Si je comprends bien tu parles d’un fait de structure qui concerne plus particulièrement les femmes en temps :
D’abord, qu’elles ont de tout temps occupées la place de la plainte … Tu parles de nouvelle hystérie. Je te demanderai, si tu es d’accord, de préciser ce point. Cela va à mon sens, avec ce que tu soulignes d’une fausse symétrie entre féminisme et masculinisme.
Et, en second point, qu’elles sont de structure « pas-toute», qu’elles objectent au signifiant … Alors toute « pas toute » qui contient un paradoxe féminicide ? Serais-tu d’accord ?
Toujours dans la même veine, je trouverai intéressant de reprendre, mais je ne sais pas encore très bien comment, ce que Lacan amène à propos des 3 figures de la passion
amour haine ignorance :
La haine comme jonction de l’imaginaire et du réel
L’amour comme jonction du symbolique et de l’imaginaire
L’ignorance comme jonction du réel et du symbolique.
Peut-être le dire comme cela : je n’en veux rien savoir du non rapport (du réel) pour échapper au réel du sexe, , je viens alors y substituer l’égalité, qui à la fois revendique un amour hors sexe , hors Eros (car il me semble aujourd’hui que c’est un signifiant qui court beaucoup (ton exemple de la saint valentin assexuelle) qui ouvre à la dimension de la haine dans une bascule toujours éminente de l’amour à la haine : substitution du symbolique (rejeté) par l’imaginaire et surgissement du réel, non pacifié par la parole… Je ne sais pas si ça te parle … ?
Enfin un autre point qui m’a retenu c’est ce que tu amènes de la négation de l’inconscient. Car il me semble que notre social et toutes les revendications « à la Préciado » vont dans ce sens : récuser la prise de de l’humain par le langage qui donne de lui sa structure de parlêtre, donc avec toute la dimension de l’inconscient.
Or, il me semble que de l’inconscient il y a toujours du fait d’être parlant. Ca, ça ne change pas… Peut-être avons-nous à repérer comment et où l’inconscient se manifeste alors ?