Genèse de la formule ($◊a) 1ère partie
05 septembre 2011

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VANDERMERSCH Bernard
Textes
Concepts psychanalytiques



B.Vandermersch. On s’excuse pour l’inconfort de certains qui ont du mal à entendre et qui en plus ne voient rien ! Ce qui suppose de suppléer à l’immédiateté de la vision par une intense activité fantasmatique. 

 

Les deux premières interventions n’étaient pas mauvaises du tout ! Il faut 3 volets pour coincer quelque chose, dit Lacan qui montre que c’est un effet de notre espace à trois dimensions sans doute, sûrement même. Alors vous avez eu un volet se situant plus sur le versant symbolique, un aspect qui questionne l’imaginaire et moi, je suis amené à questionner le réel à propos du fantasme. C’est plus aride. 

Il s’agit de voir la genèse – généalogie serait trop dire – l’évolution chez Lacan lui-même de cette formule du fantasme, devenue tellement familière qu’on ne la questionne plus. On a même l’impression qu’elle a toujours été là. Le fantasme : ($◊a), c’est ça. 

Je vais probablement interrompre mon exposé en cours de route et garder pour un deuxième temps cette question de la genèse de cette formule, la questionner par exemple dans les derniers séminaires. Les séminaires de Lacan, c’est 9000 pages sur notre disque, ce qui fait que c’est assez difficile de condenser cela en une demi-heure où presque, puisqu’à toutes les pages, il est question de fantasme. 

D’abord, voyons ce que disent Laplanche et Pontalis du fantasme avant Lacan. Pas vraiment avant Lacan. On peut même dire que leur vocabulaire est imprégné de Lacan, sans le dire expressément et notamment sur la question du fantasme. Voici leur définition :

 

« Scénario imaginaire où le sujet est présent et qui figure de façon plus ou moins déformée par les processus défensifs, l’accomplissement d’un désir et, en dernier ressort, d’un désir inconscient. Le fantasme se présente sous des modalités diverses : fantasmes conscients ou rêves diurnes, fantasmes inconscients tels que l’analyse les découvre comme structures sous-jacentes à un contenu manifeste, fantasmes originaires ».

 

Donc des scènes plus qu’un scénario, mais scénario est le terme, scénario est donc d’emblée autre chose qu’une image qui leurre, il y a un minimum de récit. Le désir de l’animal humain n’est pas coapté à une image leurrante purement et simplement. Même s’il y a aussi cet aspect d’image leurrante, mais le stade du miroir, comme on l’a vu, est loin d’être une simple sidération par l’image, comme on le voit dans le monde animal, où telle figure déclenche tel comportement, puisque le stade du miroir suppose un enfant déjà pris dans le langage et déjà pris dans un manque à être, puisque on ne voit pas pourquoi il se précipiterait à dire « c’est moi !» dans le miroir, sur une image, s’il était déjà quelqu\’un. C’est donc que c\’est le langage qui a introduit dans l’être ce creux, ce manque dont le stade du miroir témoigne.

Laplanche et Pontalis discutent la traduction du terme freudien de Phantasie, fantasme ou fantaisie. [Je vous renvoie à la conférence d’Angela Jesuino à la Maison de l’Amérique latine et au dictionnaire de Charles Rycroft, A critical dictionary of psychoanalysis, un dictionnaire anglais de psychanalyse, où cet auteur dit que les auteurs anglais, mais pas les auteurs américains, distinguent fantasy et phantasy. Il y a aussi le problème de la traduction en brésilien avec fantasma, qui renvoie plutôt à fantôme, et fantasia qui renvoie plutôt à un récit]. Lagache aurait souhaité qu’on garde le terme de fantaisie pour traduire Phantasie, mais ça évoque de nos jours beaucoup trop le côté \ »lubie\ ». 

Donc ces deux auteurs discutent de l’opposition entre imagination et réalité, mais recadrée par Freud en une opposition entre réalité psychique et réalité matérielle. L’important ici, est que, je cite (p.153) :

 

« Prise dans son sens le plus fondamental chez Freud, elle [la réalité psychique] désigne un noyau, hétérogène dans ce champ [il s’agit du champ psychologique], résistant, seul vraiment « réel » par rapport à la plupart des phénomènes psychiques ». 

 

Vous voyez qu’on est loin de la lubie, et que déjà chez Freud, interprété par Laplanche et Pontalis, nourris de Lacan – je ne pense pas qu’une telle phrase aurait été prononcée sans l’enseignement de Lacan – la réalité psychique de Freud désigne un noyau hétérogène. Ce mot est important car il anticipe sur la formule du fantasme, traduite topologiquement par le plan projectif, puisque le plan projectif est une surface telle que, si vous la coupez en deux, vous avez deux morceaux hétérogènes, qui ne sont pas de même nature. 

 

Le fantasme est donc conçu par Freud comme un noyau dur, résistant, au point que la psychanalyse est née de l’effort fait de le distinguer, ce noyau dur, de l’événement traumatique. Reste à définir ce qui fait la résistance de ce noyau dur, s’il n’est pas la trace mnésique d’un trauma, si on ne peut pas trouver sa matérialité dans l’histoire comme événement. 

On sait que Lacan va chercher à asseoir ce noyau de façon plus sûre que Freud dans la logique mathématique.

 

Je vais passer maintenant à ce qui m’a amené à ma question, c\’est-à-dire la nécessité de rendre compte de la nécessité qui a conduit Lacan à produire sa formule canonique, $◊a, avant même de la désigner comme la formule du fantasme. Par exemple dans un tableau qui date du 26 Mars 1958, dans les Formations de l’inconscient, on voit figuré, noyé dans un ensemble de formules, ce $◊a, sans qu’il soit dit que c’est la formule du fantasme. 

Donc écrire cette formule, puis passer d’une définition de a, parce que Lacan au début ne dit pas petit a, il dit a, de même qu’il ne dit pas toujours Le petit autre mais l’autre, l’autre imaginaire, avant de le distinguer dans l’écriture de i(a), tout en maintenant bizarrement la distinction entre a et i(a), a comme l’autre imaginaire, et i(a) l’image spéculaire, distinction qui pour nous ne fonctionne plus guère… 

 

– R.Chemama : C’est peut être aussi une autre façon d’écrire a-a’. 

 

– C’est une autre façon d’écrire l’a-a’ du début, et d’ailleurs on y viendra. a prend ensuite cette valeur de l’objet a, dit parfois objet petit a, valeur en soustraction de l’image de l’autre. 

La question est : pourquoi Lacan a-t-il été obligé de passer de a, image de l’autre, à a, ce qui n’est justement pas dans l’image de l’autre. Et que ça se glisse comme ça dans le séminaire, Le désir et son interprétation, sans que nulle part il ne nous mette en garde sur ce changement. C’est quand même le témoignage d’un embarras que je ne vais pas référer à l’impuissance du maître, mais plutôt à l’indice qu’il est confronté là à un réel sur lequel il bute et qui l’amène à lire autrement ce a, tout en gardant la même formule, ce qui ne manque pas de susciter mon interrogation. 

Mais sans ce passage de a, autre imaginaire, à a, objet petit a, jamais on ne pourrait rendre compte par exemple de la différence entre le deuil et la mélancolie, ou entre la dépression névrotique et la mélancolie. 

Tant que a c’est l’image de l’autre, on ne voit pas que la perte en question puisse être autre chose que la perte du spéculaire. 

 

Intervention de la salle. Certaines pathologies demandent à y revenir.

 

B.Vandermersch. Sur la distinction entre a et i(a) ? Ah oui ! Entre la mélancolie et la dépression névrotique ! Oui, il y a des dépressions qui sont au-delà de la dépression névrotique pure et simple. D’ailleurs, Charles Melman, dans une conférence qu’il avait faite sur la dépression, distinguait trois types de dépressions à partir du registre de la perte. Certaines dépressions causées parce que quelque chose a été perdu de ce qui faisait pour le sujet le symbole de son appartenance phallique, son métier, sa femme, son chien éventuellement, bref a pu précipiter dans des tableaux de type mélancolique. 

Le réel donc, c’est ça qui est derrière le fantasme, à chaque étape, et le paradoxe est que le fantasme qui dans la langue ordinaire évoque plutôt l’évaporation dans les brumes et la liberté, est au contraire ce qui contraint au maximum la réalité du sujet. Le réel, à chaque étape de ce chemin, nous le rencontrons : la question du réel traumatique de Freud comme événement, à quoi va s’opposer die Phantasie, mais au cœur de cette Phantasie, déjà pour Freud, gît un noyau irréductible qu’on va retrouver dans le rêve sous le nom d’ombilic, l’ombilic du rêve, Der Nabel

Dès l’origine, donc, le réel du sujet, ce qui sera distingué comme dimension du réel, apparaît assis, ou appendu, à un point de l’espace des représentations, point singulier, même s’il se balade partout, voire pour parler topologiquement, de singularité – singularité a une définition précise ; en topologie c’est le lieu où se produit une rupture dans la continuité d’une fonction – c’est au cœur du fantasme inconscient, supposé structurer et animer le rêve et la réalité psychique, et non dans la réalité matérielle – je reprends les termes de Freud – que Freud situe la raison du désir indestructible. Il y a de l’Autre au cœur du sujet, le Kern unseres Wesen, le noyau de notre être est de l’Autre. 

 

Alors pourquoi ces détours ont-ils été nécessaires à Lacan pour traduire ce qui semble déjà là, présent, chez Freud ? Pourquoi tous ces détours avant de pouvoir proposer une solution topologique à cette question du noyau résistant ? 

 

La première cause de ce détour me semble être l’invention par Lacan du stade du miroir ; quoique le stade du miroir, ce ne soit pas lui qui l’ait inventé, mais Wallon et d’autres. Stade du miroir, dit-il, comme « formateur de la fonction du je », ce qui évidemment nous choque aujourd’hui puisque on sait très bien que c’est le moi, ce n’est pas le je qui se forme ainsi. Enfin… ce n’est pas si simple, puisque après tout on peut très bien entendre que le moi, c’est aussi la forme que le \ »je\ » se donne, en tant que le \ »je\ » n’est qu’un shifter. \ »Je\ » renvoie à je ne sais quoi, une énonciation, ça renvoie à une question au mieux, un constat parfois. Mais un discours qui se contente du constat, c’est évidemment un discours sans énonciation. 

 

On imagine où ce \ »je\ » déduit du miroir aurait pu conduire Lacan s’il n’avait par la suite pu clairement distinguer le sujet du moi, s’il n’avait pas su se dégager de cette fascination pour l’image spéculaire, pour cette phase critique et dramatique de la première identification, aliénation imaginaire, parce que identification, c’est aussi aliénation. Sans cette aliénation imaginaire, grâce à laquelle le sujet en question prend appui sur son image spéculaire pour constituer un moi, et du même coup se rendre paranoïaque, sans cela il n’aurait jamais pu se produire cette première conception du fantasme, comme ce qui permet au sujet de parer à sa détresse face au désir de l’Autre. 

C’est sous cet aspect de détresse du sujet devant la béance du désir de l’Autre, et cela avec l’introduction du signifiant phallique dans l’Autre, que l’urgence vient pour le sujet de parer à sa propre perte. 

Donc, première conception du fantasme comme ce qui permet au sujet de parer à sa détresse face au désir de l’Autre. $ ◊ a apparaît alors dans les Formations de l’inconscient, le 26 mars 1958, date de naissance de la formule, dans une portée de trois lignes, dont je dois dire que le commentaire qui le suit immédiatement n’est ni très clair ni éclairant. Et d’ailleurs Lacan s’en rend assez bien compte. 

 

$ ◊ a          i(a)  m

 

A d         s(A) I

 

Δ    $ D         S(Abarré) Φ

 

 

Je vais m’appesantir tout de même un minimum sur cette portée de trois lignes. D’abord la signification de ces quelques lignes (schéma au tableau), Ici, il y a des flèches unidirectionnelles et, là, une flèche bidirectionnelle ; pour Lacan ça veut dire que là (flèche bidirectionnelle), on ne peut pas passer, on ne peut pas aller de gauche à droite, ou de droite à gauche, on est bloqué au milieu, ce qui laisse entendre qu’on a affaire à des choses qui sont sur la même ligne, mais qui sont coupées radicalement. 

 

La première ligne : 

 

$ ◊ a          i(a)  m

 

est évidemment celle qui nous est la plus facile à interpréter puisqu’on la retrouve dans le graphe du désir, aménagée différemment, mais c’est bien celle-là. De même que le moi prend appui sur l’image spéculaire, de même le désir prend appui sur le fantasme. Ce qui faut entendre donc, c’est que le désir humain ne vise pas un objet, mais se soutient d’un fantasme, de la même façon que le moi se soutient de l’image spéculaire, ce qui ne veut pas dire que le fantasme n’est pas pour lui un objet érotique et de tension. 

 

Le fantasme pour le sujet, c’est aussi un objet d’une certaine façon investi. Je pense à ça parce que Freud le dit à propos des paranoïaques qui délirent, délire qui vient à la place du fantasme, et qui tiennent plus à leur délire qu’à eux-mêmes, qu’à toute autre chose. Alors peut-être que le fantasme est particulièrement investi par le sujet, et d’ailleurs on peut le constater, puisque, en tout cas sous sa forme de fantasme conscient, il fait rarement l’objet d’un aveu spontané et facile. C’est quelque chose de l’ordre de l’intime. Cela dit, on peut s’en sortir en écrivant des romans, mais quand même c’est difficile. 

 

La deuxième ligne : 

 

A d         s(A) I

 

nous montre que le désir est en rapport avec la demande. Ce qu’on risque d’oublier et de mépriser la demande: comme j’ai été élevé au catéchisme lacanien, le désir ce n’est pas la demande, du coup, je ne demande rien à personne parce que moi, c’est mon désir qui compte, interprétation névrotico-biblique. Du même coup, mon désir est fondamentalement inhibé, parce que je ne peux rien demander à cette personne… 

Le désir est donc en rapport avec la demande qui rencontre le désir de l’Autre. C’est ça le problème de la demande, c’est qu’elle est confrontée à l’énigme du désir de l’Autre et je ne sais pas ce qu’il va me renvoyer sur ma demande, ce qui est une bonne raison pour ne pas demander. 

De l’autre côté, l’articulation est plus difficile à saisir : il n’y a d’identification possible à l’idéal du moi, grand I, qu’à partir des insignes de l’Autre, que Lacan écrit sous la forme « signifiés de l’Autre », s (A), ce qui est signifié dans l’Autre. 

C\’est dire que l’idéal de notre moi est quelque chose qui nous est renvoyé de l’Autre. Melman dira un jour que ce signifié de grand A, c’est le phallus. 

 

La troisième ligne :

 

Δ    $ D         S(Abarré) Φ

 

voici ce qu’en dit Lacan : « Elle essaie d’articuler le ressort même par quoi le sujet humain est mis dans un certain rapport au signifiant, ceci dans son essence de sujet. De sujet total, de sujet dans son caractère complètement ouvert, problématique, énigmatique ».

On pourrait s’arrêter à chacun de ces épithètes, mais on voit bien qu’il y a là chez Lacan une démarche de recherche, parce que ce « sujet total », ce n’est pas très lacanien, « complètement ouvert », c’est quand même l’histoire du sujet en tant qu’une question. 

A gauche, le fait que le désir du sujet passe par la demande, formule de la pulsion, mais qui n’est pas dite comme telle. 

A droite, grand phi, le phallus, est \ »ce signifiant qui introduit dans grand A, dans le lieu de l’Autre, quelque chose de nouveau\ ». Voilà ce qu’il se contente de dire, mais un peu plus bas, il va nous dire « Le phallus, , est le signifiant par lequel est introduit en grand A, lieu de la parole, le rapport à l’autre, petit a, en tant que petit autre ». On comprend bien quand petit a devient l’objet petit a, qu’il n’y aurait pas d’objet petit a inscrit dans le fantasme s’il n’y avait pas préalablement l’opération de la castration et du phallus. Mais pour introduire le petit autre, l’image, le semblable, et que cette dimension du semblable dépende même de l’introduction du phallus, ça nous fait question. Ça nous fait question mais encore une fois, Lacan distingue dans l’écriture a, l’image de l’autre imaginaire, et i(a). Il y a là quelque chose, c’est intéressant de voir que quelqu\’un pour qui nous avons une confiance totale est lui même devant un mur qu’il défonce tout doucement.

Lacan continue en disant que \ »le rapport de l’homme à son désir n’est pas un rapport à l’objet, c\’est un rapport second au fait qu’il est un animal désirant, et donc tout ce qui se passe au niveau que nous appelons ‘pervers’, consiste en ceci qu’il jouit de son désir\ ». 

 

Quant au poinçon qui se trouve distribué sur les trois lignes, ce poinçon, nous dit Lacan à ce moment-là, c’est la même chose que le schéma L. Que je vais m’abstenir de mettre au tableau parce que vous le connaissez. C’est le schéma L, à savoir que le message de l’Autre pour parvenir au sujet, rencontre la barrière du rapport a – a’. Ça, c\’est du Lacan basique. 

Ça veut dire que le rapport ainsi marqué par le losange d’un sujet à l’autre terme, par exemple au petit autre, je le cite stricto, « n’est pas autrement déterminé quant au sommet du cadran dont il s’agit dans ce châssis. Si j’écris $ ◊ D, ça ne préjuge pas du coin de ce petit carré sur lequel intervient la demande ». Donc ça peut intervenir sur grand A, petit a, le signifié de grand A, dit-il à ce moment là, ou a’. Même quand il reprend un schéma bien établi comme le schéma L, il introduit une substitution : à la place de a’, il met signifié de grand A.

 

Trois remarques tout de suite, quand Lacan produit ces écritures à cette époque, il ne les associe pas explicitement, ni au fantasme, ni à la pulsion. 

 

R.Chemama. Justement, juste une petite précision, si tu permets. Tu dis « Elle [la première ligne] inscrit que, de même que le moi se soutient sur l’image spéculaire, de même le désir se soutient sur le fantasme ».

 

B.Vandermersch. Tu as très bien fait de le dire, parce que j’ai substitué au texte, à la parole de Lacan, la mienne. J’ai essayé de contrer un effet de fading épouvantable, pour vous et surtout pour moi, d’être simplement la voix du docteur Lacan. Mais il faut donc que je le cite. Voilà donc ce qu’il dit : « Petit d, c’est le désir. $, c’est le sujet, a, c’est le petit autre, en tant qu’il est notre semblable, l’autre, en tant que son image nous retient, nous captive, nous supporte, et autour de quoi nous constituons ce premier ordre d’identifications, l’identification narcissique qui est le m, le moi ».

Voilà ce qu’il dit.

 

R.Chemama. Et à ce moment là, il ne commente pas le poinçon, ce n’est qu’après qu’il le commente.

 

B.Vandermersch. Le poinçon, il y vient après, pour dire que c’est la même chose que le schéma L. Et ça ne préjuge pas par quel bout du schéma L, $, grand A, la demande de l’Autre, que le message de l’Autre au sujet va être marqué. 

Donc, premièrement, il ne les associe explicitement ni au fantasme, ni à la pulsion ; deuxièmement, il associe sur le caractère éventuellement obscur, difficile pour son auditoire, il dit même que « ça a l’air de se mordre la queue », témoignant ainsi de son propre embarras, je dis cela parce que on a souvent dit que Lacan jusqu’aux nœuds, était très en avance, qu’il ne produisait que des…, mais non, il a toujours été en recherche, sur le bord de ce qu’il savait, et non pas à répéter ce qu’il savait déjà. 

 

Catherine Ferron. En même temps qu’il prévoyait quelque chose. Parce que quand il dessine son poinçon, il prévoit, il a une idée de quelque chose d’autre 

 

B.Vandermersch. Catherine, je pense que tu es dans ta fonction de soutenir le génie du maître, (R.Chemama. Ce qui est un fantasme) mais en ce qui me concerne je n’en crois pas un mot. 

 

C. Ferron. Mais avec l’histoire du cross cap, quand même !

 

B.Vandermersch. Le cross cap, ça c’est vrai, parce que il le dit 

 

C. Ferron. c’est vrai, là il, le dit, mais peut-être que d’autres fois il l’a pas dit, mais que quand même il a décidé quelque chose.

 

V. Nusicovici. ? Le génie du maître, est-ce que ce n’est pas d’écrire cela sur le tracé du graphe ? Et une fois que c\’est écrit sur le tracé du graphe, cette écriture pourra être déchiffrée de façon différente pourvu qu’entre les différents mathèmes, il y ait une consistance dans le dire. C’est ça le génie, c’est de les avoir mis comme ça. Ce n’est pas de les mettre simplement comme ça, c’est de les avoir mis sur ce graphe, avec son point de S de grand A barré, son point de quelque chose qui reste ouvert, qu’il faut combler par cette écriture là.

 

B.Vandermersch. Tout à fait. D’ailleurs il faut dire que, au même moment, ou très peu de temps après, le graphe a déjà commencé à être ébauché, mais la forme définitive du graphe va venir (V. N. : Elle est là déjà) elle est là mais le schéma est produit dans les pages qui suivent. 

La troisième remarque, c’est que l’idée féconde de tout ça, c\’est que parce que déjà le moi donne l’exemple, si je puis dire, d’une solution, la matrice de sa défense fondamentale contre le manque à être qui marque le sujet du langage, cette matrice des solutions, c’est « se prendre pour autre chose ». C’est le ressort de l’identification, c\’est banal. L’animal humain, c’est un animal qui se prend pour « autre chose ». Il en sera de même pour le sujet en détresse face au désir de l’Autre, face à la question du phallus comme signifiant manquant, dit Lacan, entre autres définitions, du grand . C’est cette autre chose qui va être supportée par différentes choses : l’autre imaginaire, dans un premier temps, puis un objet en soustraction de cette image, objet séparable du corps, mais pas séparable du corps comme l’image spéculaire qui le redouble dans un espace virtuel et en totalité, en tout cas de ce qui est dans le champ du regard – je crois que Bergès faisait allusion au fait qu’on ne se voyait jamais derrière et donc l’image spéculaire est une image tronquée – mais là cet objet, c\’est une partie, ce n’est pas la représentation totalisante de l’image du corps, c\’est une partie découpée à partir d’une zone pulsionnelle, et comme Freud nous l’avait appris, qui s’étaye sur les fonctions du moi, les besoins. Cet objet qui va fonder un autre type d’espace à propos duquel on disputait tout à l’heure, ce doudou qui est la matrice de cet objet a, pour Lacan – s’il a loué Winnicott de cette invention, c’est que vraiment il a apporté quelque chose de radical dans la psychanalyse, la notion d’un espace transitionnel différent, de nature différente – ces doudous, c’est quand même des choses assez étranges. Tu as souligné leur caractère topologique, troué ou pas troué, mais ils sont rarement möbiens, peut-être qu’un jour ça viendra. En fait l’important c’est l’espace dans lequel ils se ….

 

C. Lacôte. Un espace de transformation.

 

B.Vandermersch. Oui, mais fixité dans une transformation, c’est un objet qui… c’est le caractère fixe dans quelque chose qui se transforme, c’est un peu comme ça que tu en parlais. 

Dans le séminaire Le désir et son interprétation qui est vraiment le séminaire charnière pour cette question du fantasme, qu’il va falloir que vous relisiez, il n’a que 500 pages, Lacan nous donne un aperçu sur la fonction qu’il voit au fantasme, à savoir parer à la détresse du sujet dans sa relation au désir de l’Autre. Ici encore, c’est d’abord la relation du moi à l’autre imaginaire qui va servir de modèle à cette défense, avec un premier déplacement, puisque a remplace i(a). Je vais citer :

 

 « Il se défend contre cette détresse et, avec ce moyen que l’expérience imaginaire de la relation à l’autre lui donne, il construit quelque chose qui est, à la différence de l’image spéculaire, flexible avec l’autre. » 

La différence est là, c’est que c’est une relation flexible et non pas rigide. 

« Parce que ce que le sujet réfléchit, ce ne sont pas simplement des jeux de prestance, ce n’est pas son apparition à l’autre dans le prestige et la feinte, c’est lui-même comme sujet parlant, et c’est pourquoi ce que je vous désigne ici, ($ ◊ a), comme étant ce lieu d’issue, [issue de la crise] ce lieu de référence, par où le désir va apprendre à se situer, c’est le fantasme. » (Leçon du 12 novembre 1958) 

 

Intervention de la salle. Comment faut-il entendre le verbe « réfléchit » là ?

 

B.Vandermersch. Je ne sais pas, « Le sujet réfléchit », mais le miroir aussi, et il y a quand même cette prégnance, c’est du parlé, dans les séminaires de Lacan il y a beaucoup de parlé, donc il faut faire la part de ce qui peut lui surgir comme formule au moment où ça vient, et peut-être que ce ‘réfléchit’ désigne cette homéomorphie ou cette similitude du mécanisme du moi et de celui du désir, du fantasme. En tous cas, là, ce qu’il distingue, dans cette flexibilité, c’est quelque chose qui, dans le fantasme, permettrait au rapport à l’objet de ne plus être dans une rigidité, ce qu’on entend très bien dès qu’on se réfère à la psychose par exemple. Le rapport à l’image du paranoïaque, est d’une rigidité absolue, qui ne laisse pas au sujet de possibilité de substitution, enfin il peut substituer un persécuteur à un autre persécuteur, mais la relation sera dans la même rigidité, ou toi, ou moi, alors que la médiation, l’objet, lui, il est pris dans une formule emballée dans son fantasme.

 

C.Lacôte. Ce qu’il reprend dans la phrase que j’ai citée, cette chaîne souple, 

 

B.Vandermersch. Oui c’est le même mot, mais inextensible, flexible mais inextensible.

Ce sont des métaphores très matérielles pour parler de la chaîne signifiante, mais pour Freud la réalité matérielle, c’est la réalité qui est supposée physique, et pour Lacan ce qui est matériel, c’est ce qui est de l’ordre du signifiant pour le sujet. Le sujet, lui, n’a pas affaire aux portes et aux fenêtres, sauf à titre de trous dans la symbolisation, il a affaire directement au signifiant. Et son mur à lui, c’est le signifiant, parce que là il n’y a aucune médiation entre le sujet et le signifiant ; sauf justement la possibilité de construire cette limite qu’est le fantasme pour le protéger de cette soumission au signifiant qui est sinon absolue. Au début, Lacan insistait beaucoup sur le caractère tiers du langage, entre deux Moi. Il ne faut pas méconnaître le fait que par rapport au langage, on est dans une soumission encore bien plus radicale, ou tout aussi radicale, que le moi par rapport à l’image spéculaire. D’ailleurs il n’est pas impossible que le signifiant ait non seulement un effet direct sur le sujet, mais aussi sur le corps : on sait qu’il y a tout un champ de la psychosomatique qui n’est quand même pas négligeable. 

« Le sujet barré, continue-t-il, c’est le sujet en tant que parlant, en tant qu’il se réfère à l’autre comme regard, à l’autre imaginaire ». 

 

Vous voyez, cette formule qui semble contradictoire : c’est, ou le regard, ou l’autre imaginaire, parce que s’il y a quelque chose qui ne peut pas être assimilé à l’image du semblable, c’est bien le regard que je reçois. Puisque le regard abolit le visage, d’ailleurs, ce regard n’est jamais aussi bien supporté que quand le visage n’est pas là, soit que je me promène la nuit dans une forêt et que j’ai l’impression d’être regardé de partout, enfin peut être pas vous, mais tous les petits scouts ont vécu cela, mais… 

 

(Intervention de la salle. Et l’aveugle ?)

 

R.Chemama. Mais le regard, si vous prenez XXXX [ B.V. Chez l’aveugle, le regard existe ! ] chez Sartre, où le sujet se sent regardé, c’est quand il y a un bruit qu’il se sent regardé. 

 

B.Vandermersch. Oui, parce qu’il s’agit là du regard moins comme ce qui se détacherait de la fonction visuelle, que du regard tel que grand I, l’idéal du moi, me juge : « est-ce-que je vous fais une prestation suffisamment correcte pour pouvoir ne pas partir avec la honte ? » Pour l’aveugle, c\’est pareil. Cela dit, il y a certainement des différences, et pour ce qu’il en est de la manipulation de l’espace, l’aveugle est plus habile, parce qu’il n\’est pas entravé par le support de la vision. Et par exemple, j’ai déjà eu l’occasion de le dire, celui qui a réussi à montrer toute la succession des phases du retournement de la sphère, c\’est un aveugle, un mathématicien aveugle. Alors que lorsque vous regardez chacune des phases, vous êtes très vite perdu parce qu’il y a trois ou quatre plans qui s’interpénètrent quatre-cinq fois, vous ne pouvez pas vous balader là-dedans !

 

Le 10 décembre de la même année, à propos du rêve du père mort, Lacan élucide ce qu’il appelle la « formule constante » du fantasme dans l’inconscient, la formule constante, je cite :

 

« Ce rapport du sujet en tant qu’il est barré, annulé, aboli, par l’action du signifiant, [un sujet, c\’est ce que représente un signifiant pour un autre signifiant, mais c\’est aussi barré, annulé, aboli, par l’action du signifiant], et qu’il trouve son support dans l’autre, dans ce qui définit pour le sujet qui parle l’objet comme tel, à savoir que c\’est à l’autre que nous essayerons d’identifier, que nous identifierons très rapidement, parce que cet autre, cet objet prévalent de l’érotisme humain, est l’image du corps propre, au sens large que nous lui donnerons. C\’est là dans ce fantasme humain qui est fantasme de lui, et qui n’est plus qu’une ombre, c\’est là que le sujet maintient son existence, maintient le voile qui fait qu’il peut continuer d’être un sujet qui parle ».

 

Vous voyez, on est en décembre, on en est toujours à l’image de l’autre, l’autre comme objet, c\’est ce qu’il dit. Ce rapport impossible à l’objet, devant lequel le sujet est en aphanisis. Lacan introduit le terme d’aphanisis repris de Jones, mais dans un autre sens et il l’explicite. Le problème est que le sujet trouve son support dans cet objet, mais cet objet, il ne peut pas le supporter. Il a la solution, mais cette solution est à la limite peut-être pire que le mal, parce qu’il ne la supporte pas. Devant cet objet, il est en aphanisis. Je cite :

« C\’est en raison de l’interposition du signifiant que l’objet humain subit une sorte de volatilisation que nous appelons, dans notre pratique concrète, la possibilité de déplacement. Ce qui ne veut pas dire simplement que le sujet humain, comme tous les sujets animaux, voit son désir se déplacer d’objet en objet. Ce n’est pas ça. Mais que ce déplacement même est le point où peut se maintenir le fragile équilibre de son désir. En fin de compte, de quoi s’agit-il ? Il s’agit d’envisager d’un côté d’empêcher la satisfaction, tout en gardant toujours un objet de désir ».

 

Ce qui suit donne les prémices de l’objet a. 

 

« D’une certaine façon, c\’est encore un mode de symboliser métonymiquement la satisfaction et nous avancerons là tout droit dans la dialectique de la cassette et de l’avare, il faut que le désir subsiste ». ( Leçon du 10 décembre)

 

Vous voyez, tout en disant que la solution, c\’est l’image de l’autre, mais que l’autre, pris dans cette fonction, est quelque chose d’intolérable au sujet, devant lequel il est en aphanisis. L’image qui lui vient, c\’est l’avare et sa cassette. Manifestement là, on est beaucoup plus près de la désignation de l’objet a dans sa cassette, qui est la cause du désir de l’avare et de sa rétention et, pour que le désir subsiste, en tant qu’il interdit la satisfaction mais qu’il la maintient. Lacan dit que le désir subsiste dans une sorte… d’empêchement de la satisfaction mais c\’est encore un mode de symboliser la satisfaction, parce que l’avare, de détenir cette cassette, éprouve une satisfaction d’autant plus étrange qu’en fait il n’en jouit pas, de cet argent, il ne le dépense pas.

 

Intervention de la salle. On a ça avec la bouchère ?

 

B.Vandermersch. Avec « la belle bouchère », c\’est plus complexe. C’est plus complexe d’abord parce qu’on est dans le registre de l’hystérie, mais effectivement c\’est quand même un des modes de soutien du désir, puisqu’ à partir de là Lacan va développer des choses bien sûr – il l’a peut être déjà fait à ce moment là – pour montrer comment le névrosé soutient son désir en le maintenant dans une forme d’insatisfaction ; d’insatisfaction vraie pour l’hystérique, c\’est à dire de désir d’un désir insatisfait, pour reprendre le terme freudien, de le rendre impossible pour l’obsessionnel ou de le prévenir dans ce qui est la phobie. C\’est un peu notre petit catéchisme qui nous aide à nous débrouiller, même si ça nous empêche de penser, ça nous aide quand même de temps en temps. Il faut faire un peu de dialectique avec notre savoir : on a des outils familiers, mais de temps en temps il faut se demander « qu\’est-ce que j’ai dans la main, qu\’est-ce que c’est que ce truc ? »

 

Mais bientôt, Lacan va parler, plutôt que d’un support, d’un affrontement du sujet à a, sous un jour nettement plus dramatique. C\’est le 17 décembre 1958, qu’apparaît pour la première fois l’expression objet a, et cela dans le contexte d’analyse de rêve et du terme « Jonesien » d’aphanisis. Je cite 

 « Cette écriture $, vous montre que, quant à son désir en somme, l’homme n’est pas vrai puisque quelque peu ou beaucoup de courage qu’il y mette, la situation lui échappe radicalement ; qu’en tout cas cet évanouissement, ce que quelqu\’un a appelé en parlant avec moi, \ »ombilication du sujet au niveau de son vouloir\ », et je recueille très volontiers cette image de ce que j’ai voulu vous faire sentir autour du $ en présence de l’objet a. D’autant plus que c\’est strictement conforme à ce que Freud désigne quand il parle du rêve. »

[ici Lacan va évoquer \ »le terme très étrange, dit-il, sous la plume de Freud de Unbekannt \ », ce qui est une erreur puisque en fait le terme de Freud c\’est Unerkannt – enfin on a le droit de se tromper – Unerkannt qui d’ailleurs est un adverbe et non pas un participe passé selon mon dictionnaire d’allemand ; Unerkannt, ça veut dire : incognito, je me promène incognito, c’est-à-dire sans être reconnu, ce qui n’est pas le non-connu. Vous voyez que les traductions peuvent être un peu lâches. Maintenant Freud parle le viennois et le dictionnaire est allemand.]

«  En effet le désir comme tel, et par rapport à tout objet possible pour l’homme de ce désir, pose pour lui la question de son élision subjective. » (7 janvier 1959). 

Il n’y a pas un sujet qui désire un objet, mais un sujet devant l’objet et Lacan dit qu’à ce moment là du désir, le sujet disparaît, est en aphanisis, il redevient pure question, pur trou. C\’est comme ça qu’il faut l’entendre. Je cite : 

« Le sujet comme désir, à approcher cet objet, se trouve pris dans cette sorte d’impasse qui fait qu’il ne saurait l’atteindre lui-même qu’en se trouvant comme sujet de la parole, soit dans cette élision qui le laisse dans la nuit du traumatisme, au delà de l’angoisse, au delà de l’angoisse même, soit devoir prendre la place, se substituer, se subsumer sous le signifiant phallus ».

 

Ça, je dois dire que c\’est un peu bizarre. Parce que se subsumer, se substituer sous le signifiant phallus, en tant que le phallus est quand même le signifiant qui manque dans l’affaire, ça veut dire que quand même, là il y a une place. Parce qu’il y a toujours une équivoque entre le sujet, on dit aphanisis du sujet, mais le sujet ne fonctionne que quand il est aphanisé ; parce que s’il est comme un signifiant, il disparaît sous le sens de ce signifiant ; c\’est à dire que le sujet n’existe que comme ek-sistant au signifiant. Et donc en fin de compte, cette aphanisis n’est pas si dramatique. 

[Ici je me trompe. Etre en aphanisis pour le sujet c’est être réduit au signifiant (relecture)]

C.Lacote. C\’est plus clair de dire ek-sistance que aphanisis. 

 

B.Vandermersch. Oui. Je le maintiens parce que Lacan s’en est beaucoup servi

 

R.Chemama. Beaucoup dans ce séminaire là. 

 

B.Vandermersch. Oui, et dans Les Quatre concepts où, dans le processus de subjectivation, Lacan décrit le premier temps d’aliénation avec l’aphanisis du sujet et le retour du sujet dans la faille de l’Autre, dans le questionnement possible ou impossible du désir de l’Autre en tant qu’il apparaît comme un défaut dans la signification, défaut qui sera circonscrit ou indiqué par Φ, dans les bons cas, à partir de quoi une place, un manque, est possible pour (que) le sujet (puisse) loger son propre manque. 

 

Je vais boucler avant d’arriver à La logique du fantasme, ce qui nous permettra la prochaine fois de questionner plus amplement le poinçon et ses formes, de montrer ce qu’on appelle la rigueur de Lacan, qui n’est pas tout à fait une rigueur logicienne, ni une rigueur mathématique. C’est quelque chose qu’il faudra essayer de situer : qu\’est-ce qui fait que même dans les écritures les plus strictes, il y a toujours déplacement, métaphore, etc. 

Je vais presque terminer par ceci comme exemple. Dans cette même leçon du 7 janvier 59, Lacan démontre longuement que le symptôme, puisque ça nous intéressait tout à l’heure, le symptôme ne peut être seulement l’effet d’une frustration, mais qu’il est l’effet d’une dialectique infiniment plus complexe qui s’appelle désir. Je cite

 :

« Si le désir est quelque chose qui ne peut se saisir et se comprendre qu’au nœud le plus étroit, non pas de quelques impressions laissées par le réel,  mais au point le plus étroit où se nouent ensemble pour l’homme, réel, imaginaire, et son sens symbolique. » 

 

Intervention de la salle. Et son sens symbolique?

 

B.Vandermersch. Oui, le petit.., le grain de sable est dans la formule. 

« Et son sens symbolique. Ce pourquoi le rapport du désir au fantasme s’exprime dans ce champ intermédiaire entre les deux lignes structurales de toute énonciation signifiante »

 

Ceci fait allusion au graphe avec ses deux étages, la chaîne de l’énonciation, la chaîne de l’énoncé, et le champ du désir qui se trouve entre les deux. A ce propos Lacan va produire une autre formule, avec le même poinçon, formule qui n’aura pas de postérité mais qui mériterait qu’on s’arrête aussi pour la questionner. 

 

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 $         I

Mais peut être que pour aujourd’hui ce premier début de trajet pourra suffire.