Font encore parler d’eux
25 février 2019

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MELMAN Charles
Editos, Rue des Archives
Font encore parler d’eux
 
À la télé, le brillant philosophe médiatique, celui qui parle comme une Kalachnikov, dit qu’il faut réagir à l’antisémitisme non pas par la morale mais en en cherchant la cause. Pour contribuer à sa quête, qu’il me permette de lui en proposer deux de plus.
La première, la plus impressionnante à mes yeux, est qu’il n’y en a pas. La tradition veut en effet que, dans toute famille nombreuse, l’un des enfants soit sacrifié. Dans celle qui s’est multipliée avec le monothéisme, il est inscrit qu’il y en aura un, et pourquoi pas l’aîné, le préféré, tiens, justement celui qui a voulu substituer un sacrifice symbolique à celui qui était humain, qui sera renvoyé à l’expéditeur. Il était en trop, il bouchait la perspective, empêchant qu’on soit entre nous.
D’autant que, et maintenant la seconde raison, le voilà chargé comme une mule de tout ce que le décret divin nous invite à rejeter, à l’égal de ce qui constitue l’inconscient. Il y avait à l’École freudienne un malheureux qui avait découvert que l’inconscient parlait le yiddish ! N’avait pas compris que “juif” était un qualificatif pour désigner ce qu’il y avait à rejeter en chacun d’entre nous, et comme on n’y arrive pas, l’antisémitisme subsiste alors même que de juif  – nom commun  des membres d’un peuple – il n’y en a plus. Finkielkraut est ainsi le témoin – membre du peuple témoin – que des juifs, il y en a eu, nostalgie, et qu’ils sont aptes à devenir convenables.
D’hommage ?
Charles Melman
20 février 2019