Conclusions des Journées sur Le désir de Lacan"
17 juillet 2022

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MELMAN Charles
Rue des Archives, Colloques, Journées d'études
Journées d’étude : Le désir de Lacan 
Samedi 18 et dimanche 19 juin 2022
Conclusions des Journées par Charles Melman

Je crois qu’il convient avec plaisir de féliciter les organisateurs de ces journées, je voudrais également à titre personnel féliciter le dessinateur de cette très juste vignette représentant Lacan comme ce personnage étrange, l’œil surpris par les individus qui viennent le contempler et que nous sommes donc avec tout ça, dans la justesse de notre approche.

Je commencerai par ce qui a été le commencement, l’évocation par des collègues de la pratique si particulière de Lacan qui me paraît juste, de signaler l’usage inattendu de son corps. Ce qui a été raconté et comme étant ses approches, ses palpations, ses haleines, ces sortes d’invitations au tact et aux contacts sans que viennent s’y glisser la moindre haptonomie mais je dirai le désappointement de celui qui croit sans doute s’adresser comme il convient à un esprit ou à une âme et qui se trouve avoir des réponses laïques qui viennent du corps.

Remarquez aussi, je crois que ça a quelque intérêt, la façon dont elles seront prises ces interventions corporelles au moment où il s’agit d’une question majeure et qui concerne sûrement chacun d’entre nous et qui est celle de savoir si lorsque pour un sujet, a fait défaut le père symbolique en tant qu’il n’a eu affaire qu’à un père réel et imaginaire, ce qui est aujourd’hui, une figure assez fréquente, eh bien si la dimension du symbole portée par ce père qui a fait défaut, est susceptible d’être ou non réintroduite par la cure. Est-ce que vous y arriverez ? Il est pourtant absolument majeur pour avoir un fonctionnement qui soit recevable que vous ayez une petite idée, un petit accès à ce qu’est le symbole dans une situation où vous en avez été radicalement privé.

Ceci débouche directement sur la question de la transmission et qui concerne aussi l’enseignement que nous donnons à l’Association. Est-ce que nous sommes clairement en mesure de séparer ce qui est le savoir et les connaissances. Ça n’a pas rien à faire mais ce n’est pas du-tout la même chose. La seule chose que vous puissiez enseigner ce sont des connaissances, c’est-à-dire un ensemble de trucs destinés à la pratique quelle qu’elle soit d’ailleurs. Le savoir c’est tout autre chose puisque c’est celui qui va commander à la fois votre usage des connaissances et éventuellement la dimension éthique qu’elles comportent avec elles.

Comment ça se transmet le savoir ? Ça se transmet d’une façon étrange puisque en général c’est la surprise de la jeune fille au réveil qui a un sentiment qu’il s’est passé dans la nuit ce qu’elle n’attendait sûrement pas mais qui doit relever de la dimension du viol puisque la voilà qu’elle se retrouve dotée du savoir d’une identité sexuelle dont elle n’avait pas jusqu’ici l’idée.

Même si la dimension du viol ne s’y trouve pas rattachée la manifestation est la même chez le petit garçon qui se retrouve subitement le corps habité par des pulsions libidinales qu’il va d’ailleurs éventuellement juger comme étant des manifestations de maladies. Il va se plaindre auprès de sa maman puisqu’il a de ce côté-là d’étranges érections auxquelles il ne comprend pas grand-chose.

Nous ne pouvons en tant que psychanalystes décider de savoir si nous parvenons à transmettre des connaissances, c’est-à-dire des trucs, y compris d’ailleurs des concepts qui peuvent valoir comme faisant liens entre nous car la question du lien entre nous est elle-même évidemment problématique, ou bien si nous parvenons à faire que ces connaissances viennent agir, s’insérer, viennent faire partie du savoir d’une manière qui le rende plus heureux, c’est-à-dire plus juste.

Il a été longtemps reproché à Lacan de pratiquer cet enseignement dont il était dit qu’il aliénait ses élèves. Ce qui est vrai, c’est effectivement une forme d’aliénation et la  question de savoir si la réaction de ceux qui à ce moment-là était le brillant état-major constitué autour de lui et sur lequel il comptait beaucoup, si le départ de ce brillant état-major était justifié dans la mesure où il dénonçait l’abus que Lacan exerçait sur eux par l’intermédiaire du transfert afin d’en faire ses créatures. J’ai déjà raconté maintes fois combien arrivant dans ce milieu à cette date et alors que j’avais de nombreux amis dans cet état-major, j’ai pu être évidemment secoué par cette dénonciation faite sur la volonté de Lacan sauf, à remarquer ceci, c’est que à supposer que ces brillants collègues soient spontanément menés au  terme de leur travail analytique eh bien ils arriveraient à l’accès à un grand Autre, le leur, qui n’avait strictement rien à leur dire ni aucun engagement à leur proposer ne serait-ce simplement parce que ce grand Autre n’existe pas.

Autrement dit, lorsque Lacan les invitait en quelque sorte à cette opération d’enseignement qui était la sienne, il leur donnait l’occasion d’engagements sociaux qui étaient d’un autre calibre, sûrement d’une autre justesse que les divers engagements politiques ou religieux dans lesquels ils avaient l’habitude de s’égarer et de perdre leur temps quand ce n’était pas perdre son âme.

Quel était le désir de Lacan ? Il y a là-dessus, même si sa formulation va vous paraître sans doute étonnante, mais il n’y a pourtant là-dessus aucun doute, le désir de Lacan était de faire que la psychanalyse dans laquelle il s’était trouvé introduit non pas par destination mais comme tout le monde plus ou moins par hasard, et qu’il était tombé sur la découverte la plus sensationnelle, la plus extraordinaire qui ait jamais existé dans l’histoire de l’humanité et découverte qui par son initiateur brillant, évidemment comme tout le monde névrosé, cette découverte qui se trouvait réduite à la vocation d’une action, d’une destination thérapeutique ouvrant la question suivante : mais alors la normalité, où est-ce que vous l’avez vue, en quoi elle consiste ? Est-ce que la névrose n’est pas dans ce mouvement même qui vous amène à conceptualiser la psychanalyse ? Il y a vis-à-vis de Freud un manquement radical que la pudeur liée au caractère sinistre des événements de l’époque et je suppose que ce sont ces évènements sinistres qui ont empêché et contrarié le fait que soit analysé chez Freud la question de son rapport au père. Ce n’est pas ce à quoi je vais me livrer maintenant, vous vous en doutez bien, mais c’est en tout cas une question tellement évidente, qui crève les yeux : la psychanalyse peut-elle se tenir, se justifier d’une relation qui malheureusement est au départ entièrement névrotique à l’endroit du père c’est-à-dire, je l’ai évoqué, ce n’était pas par hasard, un père, Jacob, qui n’était pas en mesure d’introduire son fils à une dimension symbolique qui tienne. Freud en parle lui-même sans difficulté, sans gêne mais évidemment il ne peut pas aller jusqu’au bout.

Le désir de Lacan a été de montrer que dans la relation que nous avons au signifiant, l’élément directeur n’est justement pas l’instance paternelle au moins-une. C’est le Nom-du-Père qu’il devait traiter et sur lequel il s’est arrêté. Elle n’est pas, l’instance paternelle au-moins-une mais elle est cette instance directrice, tenez-vous bien, nous en parlons évidemment comme si c’était un objet familier mais c’était ce qui nous dirige, un objet et un objet dont la constitution dernière, c’est-à-dire une fois dépouillé des avatars qu’il peut prendre dans la réalité, révèle sa vraie nature, c’est-à-dire d’être absent. Il a appelé ça, l’objet petit « a ». C’est effarant, nous tous qui sommes là rassemblés, jouant au bilboquet avec nos concepts etc … nous sommes mus par évidemment ce que par ailleurs nous enseignons, nous sommes mus par un trou. Ce n’est pas un trou indifférent, c’est un trou essentiel c’est-à-dire celui justement qui a fait qu’en nous réveillant un matin nous étions sans savoir comment ça s’est passé, le corps habité par une identité sexuelle et par un désir sexuel.

L’objet petit « a », il l’a dit d’ailleurs, « la seule chose que j’ai apportée, c’est l’objet « a ». Mais l’objet petit « a », si vous reconnaissez que c’est l’objet petit « a » qui fait commandement, qui vous régit, qui vous fait parler, qui vous fait déconner, qui vous fait vous prendre pour ce que vous n’êtes pas etc…etc… ça modifie complètement toutes les données de votre identité, les données de votre désir, les données de votre parole, les données de votre rapport à autrui parce que comment se situe dès lors la différence des sexes si c’est l’objet « a » qui commande votre subjectivité et comment dès lors se débrouillent ou ne se débrouillent pas, les sexes entre eux  ?

C’est un monde complètement différent qu’annonce, que régit la primauté de l’objet « a » et le fait que l’instance paternelle, l’instance au-moins-une se révèle ce qu’elle est, c’est-à-dire cette espèce de bâton dont le parlêtre se protège parce qu’il a peur de l’exercice de sa sexualité alors il lui faut un protecteur, il faut même qu’il n’en soit pas responsable. Il n’en est que l’exécutant, il ne fait que ce qu’on lui dit, mais lui à la limite il n’y est pour rien.

Je ne suis pas certain que cela n’ait jamais été dit, c’est que le rapport à l’au-moins-un, dès lors qu’il organise une communauté, il ouvre les fenêtres et les portes à toutes les saloperies les pires. Lacan se méfiait beaucoup dans son propre groupe d’une organisation en sous communautés et c’est effectivement dans l’une d’elles qu’il eut à souffrir sa vente, puisqu’il a été vendu sur la place publique : s’il  arrêtait son enseignement et la formation on voulait bien qu’il continue ses éclats mais sans plus avoir de responsabilités ni d’autorité. C’étaient les conditions de la vente, à la condition qu’on lui coupe les couilles, il était admissible.

C’est fou, aujourd’hui, quand j’ai le malheur d’ouvrir les informations et que je voyage entre le tumulte provoqué par un match de foot et puis le nombre de morts là-bas en Ukraine, je ne sais pas comment cette coexistence est supportable et possible, comment elle est supportable et possible s’il n’était effectivement et justement cet au-moins-un paternel. Chez les souteneurs des clubs de foot personne ne les oblige à participer au club de Liverpool ou celui du Réal Madrid, mais on est prêt à tuer l’autre parce qu’il n’est pas du même club. Je ne sais pas, c’est pas non seulement supporté mais ça ne fait pas péter de rire. Qu’est-ce qui est là, à l’œuvre ? Rien, seulement le rapport à l’au-moins-un, c’est tout. A partir de ce moment-là vous êtes libres, non seulement vous êtes libres mais vous avez le devoir. Évidemment lorsqu’au lieu d’un match de foot il s’agit d’engagement qui est celui d’un certain nombre de chars, de canons et puis de managers de l’équipe un peu excités, ça passe dans la même fournée. Ça ne vous paraît pas étrange cette horreur ? Cette horreur est celle de nos existences auxquelles la mutation culturelle en cours et que nous rencontrons tous, il est évident que le monde est en train de changer et que ces événements que je rapporte sont peut-être les dernières convulsions capables d’emporter la planète et peut-être les dernières qui se produiront, parce qu’il se produit cette mutation culturelle que nous commentons à l’occasion, par exemple nous l’avons fait avec Jean-Pierre Lebrun à propos de la dysphorie du genre. Cette mutation culturelle où il est possible de lire justement l’interprétation pourrie faite de l’œuvre de Lacan, je ne vais pas développer ça, mais si vous y réfléchissez vous verrez que tant du point de vue de l’identité, de l’autorité entièrement passée du côté de l’opinion, du côté de la jouissance, du côté du sujet…

Nous répétons souvent parmi nous, le sujet de l’inconscient, le sujet de l’inconscient, mais vous en connaissez un autre ? Il n’y a que le sujet de l’inconscient,  celui qui justement parle à partir de sa vérité, c’est-à-dire le trou ce qui le fait parler. Il ne fait que d’être le porte-voix de ce qui s’articule  à partir de ce trou, ce qui fait qu’il ne sait pas ce qu’il dit mais nous est-ce que nous savons toujours ce que l’on dit ? Est-ce que moi qui suis là à donner des leçons, est-ce que je sais ce que je dis ?      

Je pourrais vous raconter quelques anecdotes à cet égard mais je ne suis pas sûr qu’on ait le temps, ce sera pour une autre fois. Moi j’ai beaucoup de chance parce qu’à l’occasion d’une cérémonie qui avait lieu à la Sorbonne où j’avais été appelé à être membre d’un jury de thèse, à la sortie de la cérémonie où je m’étais affronté aux deux imminents personnages qui étaient les autres membres du jury et qui étaient des gens très bien, il y avait notamment Chatelet et Bonnefoy, je ne sais pas si  leurs  noms vous disent quelque chose, et à la sortie où les nombreux auditeurs présents à cette thèse avaient pu constater la force des concepts de Lacan face aux excellents et savants raisonnements de ces personnages de qualité, Lacan a pu dire comme ça publiquement : « Ah, me désignant, ah eh bien moi j’ai pu réussir des analyses alors que Freud n’en a pas réussi une seule ! ». Vous voyez, j’avais de la chance, c’est formidable ! Moi je ne le savais pas, moi j’ai réussi mon analyse et alors je cherchais quelle était cette réussite évidemment, qui est-ce qui en jamais profité de cette réussite de l’analyse ? J’avais cette formule de Lacan, « la réussite de l’analyse c’est savoir y faire avec son symptôme », alors est-ce que je savais y faire maintenant avec mon symptôme ? Le savoir y faire, ça ne me plaisait pas beaucoup… ça a un coté péjoratif … Si vous saviez y faire, aussi bien la brillante conférence que la vente des pantalons, savoir y faire avec son symptôme… Est-ce que je savais y faire avec mon symptôme ? Si je reconnaissais que j’étais venu en analyse parce que justement mon symptôme était celui d’une inhibition sociale qui faisait  rater ou manquer mon insertion sociale, est-ce que  j’avais su y faire avec mon symptôme mise à part cette circonstance tout à fait occasionnelle de ce jury de thèse et où j’étais porteur de quelques raisonnements, de quelques concepts susceptibles de déboulonner des personnages brillants et qui ne le méritaient pas, ils n’étaient pas mal…

L’affaire aujourd’hui, c’est-à-dire du mésusage fait de l’enseignement de Lacan, vous direz que c’est mégalomane de la part de Lacan de penser que ce qu’il apportait était susceptible de provoquer une mutation culturelle et vous n’accordez aucune attention au fait que cette mutation culturelle est dirigée par deux ou trois signifiants dont l’un s’appelle la déconstruction, venant directement par l’intermédiaire de Derrida, bien que le concept ne soit pas chez Lacan bien sûr. Le terme de déconstruction qui joue un rôle absolument majeur dans cette espèce de connerie et de marasme culturel dans lequel nous nous trouvons plongés, devant le fait que le travail qu’a fait Foucault, dans l’action de démolition de la figure paternelle et qui se trouve entièrement reprise, non pas seulement de  Freud et malgré ce que Lacan a pu dire là-dessus, cette action de Foucault est génératrice aujourd’hui de cette théorie absolument répugnante qui s’appelle la théorie du Gender. Donc simplement le rappel que depuis la distance prise avec la religion,  notre époque n’a connu que des mutations culturelles dont le rôle directeur était tenu par telle ou telle discipline,  que ce soit la philosophie, que ce soit la science, l’histoire, l’économie, que ce soit la thermodynamique etc, etc…

Ce qui m’a gêné dans ce qui a été l’action de Lacan, ça a été  qu’il n’a pas hésité, puisque j’ai évoqué au départ l’intervention de son corps dans la relation à son patient, qu’il n’a pas hésité à faire de son corps l’image justement de cet objet exposé aux coups d’un auditoire qui ne savait pas ce qu’il faisait, ce qui est bien normal, c’est-à-dire finalement de son corps douloureux comme témoin de la vérité. J’ai beaucoup été gêné bien sûr par les comparaisons qui s’évoquent avec celui qui a fait de son corps supplicié le témoignage d’une vérité essentielle.

Enfin je voudrais terminer ce parcours  évidemment rapide en vous rappelant une chose qui m’est apparue en vous écoutant, Lacan il n’a pas publié un seul livre. Les Écrits ce n’est pas un livre, c’est un recueil d’articles, d’adresses circonstanciées, c’est tout autre chose qu’un livre ! Il n’a écrit aucun livre alors qu’il avait un talent littéraire certain. Il me poussait d’ailleurs, il avait l’habitude de déléguer ce qu’il ne faisait pas. Il devait trouver que je maniais correctement la plume, ce que je déteste faire et ce qui fait que moi non plus je n’ai jamais écrit de livres bien que j’en aie une vingtaine qui sont en librairie, ce ne sont jamais les vivants …

Je passe sur ce point pour rappeler qu’il y a justement dans la question du rapport à la lettre quelque chose de fondamental, je dirais … vous vous rendez compte de ce que je vais dire, le danger des livres ce qui pourtant font de si jolis décors dans nos salons, le danger des livres…Il y a quelques jours à l’occasion d’un petit devoir que j’avais à faire pour la parution d’un prochain numéro du Journal français de psychiatrie, je rédige un petit papier et dans ce petit papier il m’est venu sous la plume ceci, il y a un mot en hébreu, je ne suis pas un familier de l’hébreu, ça fait partie du savoir général, pas besoin de l’être pour le savoir, il y a un mot qui se dit Brit_Milah, qui veut dire tout simplement Brit : alliance et Milah,  qui a deux sens, l’un la circoncision, bon l’alliance par la circoncision, d’accord, et puis il a l’autre sens de Milah qui veut dire mot, le mot, l’alliance par le mot, la circoncision par le mot et puis un troisième sens, tout à fait étrange qui apparaît  et qui est l’apparition de la face, faire face !

Qu’est-ce que ça vient foutre là-dedans ? Qu’est-ce que c’est ce méli-mélo ? Il est bien évident que les spécialistes, les talmudistes, les herméneutes etc se sont précipités pour dire que le Milah avait des racines différentes dans l’un et l’autre sens. Bien sûr, c’est une question de racines, des racines différentes, oui, sauf que c’était le même mot ! Alors est-ce que c’est la racine qui faisait le mot ou le mot qui faisait la racine ?

Je termine sur ceci puisque très justement l’un de vous, je crois que c’est Rolland, je ne sais plus, a évoqué le fait que la transmission en dernier ressort, en psychanalyse… c’est vrai qu’est-ce que vous transmettez ? Je pourrais poser une question plus simple : est-ce qu’il y a un seul signe qui vous réunit ? On se sert en dernier recours de l’appartenance à une même association mais ça n’exclut absolument pas qu’elle soit habitée de personnes complètement différentes voire hostiles entre elles, hostiles contre les leaders etc … Est-ce qu’il y a un signe commun aux psychanalystes ? Est-ce qu’un psychanalyste a un nom propre ? Si vous avez un nom propre, vous vous référez à un père mais justement ce que vous avait enseigné la pratique de notre exercice, c’est la résolution du transfert, autrement dit ce nom propre peut vous en alléger. Alors, est-ce qu’il y a un trait commun entre les psychanalystes parce que si vous voulez transmettre, vous ne pouvez transmettre qu’un trait, lequel ? Vous voyez que cette question en vient enfin à ce que Lacan a pu dire, la seule transmission évocable était celle du style.

Le style ? Qu’est-ce que ça veut dire le style ? Le style ça veut dire est-ce que vous êtes en représentation, c’est-à-dire respecter la langue en tant qu’elle est celle du semblant ou bien est-ce que vous êtes en présentation, présentation de quoi ? Présentation du réel, c’est-à-dire de la vérité ! Nous avons l’habitude et je vais conclure là-dessus, de nous amuser et de nous balader avec la vérité, le réel, mais le réel c’est justement ce avec quoi vous ne pouvez pas spéculer, calculer. C’est la limite, c’est l’interdit, c’est l’impossible, c’est ça le réel, c’est Gödel, Hilberg. Évidemment il y a eu Cantor qui sur de l’infini à l’inf…   La démonstration que fait Lacan, c’est que le réel c’est l’impossible, c’est même la garantie du fait que dans vos spéculations, si vous en tenez compte, c’est le témoignage que vous n’êtes pas fou.

Ce qui ne peut pas se dire, peut s’écrire. Vous pouvez calculer, compter et pour le parlêtre c’est essentiel ce réel puisque c’est avec l’impossible, avec l’interdit et avec l’objet petit « a » qui cause son désir, là où il met le Nom du Père, avoir quelqu’un avec qui il s’imagine pouvoir dialoguer, pouvoir prier si l’autre ne répond pas…. Ce qui étonnait dans Lacan c’est qu’il n’était pas dans la représentation, jamais, il était toujours dans la présentation du réel en tant qu’il est celui qui anime sa parole. Sa dernière conférence publique faite pour l’anniversaire d’Aristote et alors qu’il était déjà sérieusement malade, sa dernière conférence publique, elle s’appelle « Présentation et représentation ». Lorsqu’on la lit on est déçu, on se dit de quoi il cause, est-ce qu’il sait encore de quoi il cause ? Il faut la relire ! En tout cas, en ce qui nous concerne, il est bien évident que les quelques éléments de ce parcours que je viens de faire sont évidemment déterminants dans notre style.

Je vais faire des journées, ce sera celles des connaissances mais comment leur accès au savoir…,,, est-ce qu’un psychanalyste dans sa pratique obéit à des connaissances ou bien est-ce avec son savoir, c’est-à-dire avec son inconscient qu’il turbine ?

Grâce à votre travail brillant pour ces quarante ans de l’ALI, grâce à votre travail vous avez soulevé des problèmes essentiels et la question est de savoir si nous serons à la mesure de ces problèmes et de la façon d’y répondre.

Dans le cas présent, dire correctement, ça a un sens sans que ça dépende d’aucune énonciation préalable et d’aucune imposition par quelque savoir que ce soit.

Merci pour votre attention.

S’il y a une question qui vient pour qu’on n’ait pas l’impression ite missa est, s’il y a une question, si quelqu’un a quelque chose à dire, il est le bienvenu.

Je vais abuser et prendre son temps virtuel puisque personne ne s’est manifesté, les séances courtes, c’est odieux ce qualificatif. Quand est-ce que ça commence pour vous,  ce qui est un temps court et un temps long et à quoi vous le jugez ? Mais surtout il y a une chose fondamentale que vous pouvez enseigner, c’est que le temps ça n’est même pas une unité physique, ça ne se prête même pas à une unité physique puisque il suffit que vous tourniez, je dirais sur une autre planète, que vous ayez un temps différent et subjectivement est-ce que vous tournez toujours forcément autour de la même planète, celle qui vous rassure, qui vous dit, ah oui le Un est au rendez-vous.

Lacan a donc écrit Le temps logique et l’assertion de certitude anticipée. C’est incroyable ce texte, incroyable puisqu’il est le seul à vouloir montrer qu’il existe une logique dont les éléments sont ceux du temps et qui est une logique collective et que l’issue salvatrice ou non de la lecture du temps est la condition de votre affranchissement. Vous avez déjà lu quelque part quelque chose qui fasse référence au temps, à l’unité du temps comme constitutif d’une logique, deuxièmement d’une logique collective et troisièmement ayant pour conséquence ce type de résultat ?

Ceci pour vous dire que nous sommes  évidemment, les uns et les autres peu préparés par les enseignements d’où nous venons, tout ce qui se trouve là étalé et qui nous renvoie en général aux faibles capacités mais qui en tout cas ont le mérite de nous inviter, c’est quand même une invitation, et puis on ne s’ennuie pas.

Je conclurai véritablement là-dessus, un analyste, c’est très bizarre, ne peut pas avoir le sentiment qu’il a raté son temps ni son parcours. Il peut avoir été plus ou moins bon, ceci ou cela mais il ne peut pas penser qu’il a raté sa vocation une fois qu’il est tombé dedans. Il n’était pas à la hauteur de la tâche mais la tâche est telle qu’il était dans la mériter.

Voilà, merci encore à nos amis, merci pour votre attention et puis à une autre fois. Á bientôt.

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