Avant-propos
« Ce séminaire, je l’écrirai », voilà ce que Lacan a rêvé pendant plusieurs années et que le mouvement dans lequel l’emportait son enseignement ne lui a pas permis de réaliser. Tenu en 1959-1960, c’est sans aucun doute le plus important et le plus original de tous ceux qui représentent l‘enseignement public qu’il a assumé pendant vingt-cinq ans de 1953 à 1978.
Nous pouvons regretter qu’il n’ait pu réaliser son projet, ce qui n’empêchera pas la transcription de son discours de constituer, comme l’a déclaré Charles Melman lors du séminaire d’été qui lui a été consacré à Bruxelles en 1990, le texte le plus important du XXe siècle.
Il n’est pas inutile de rappeler que ce qu’on a appelé la Guerre froide atteignait à cette époque un apogée, la crise dite des fusées de Cuba étant survenue quelques mois après la leçon du 18 mai 1960 où Lacan pose la question : avons-nous passé la ligne ? et s’inquiète des conséquences imprévisibles de ce qu’il nomme le paradoxe du désir. Ces quelques lignes prennent rétrospectivement un poids considérable.
Enfin, il ne m’a pas paru déplacé d’y joindre le texte sur la composition des séminaires de Lacan, publié dans le numéro 1 de la nouvelle série du Discours psychanalytique, où je tente de faire valoir la dimension supplémentaire que fait apparaître la mise en valeur de la construction de l’ensemble dont je crois pouvoir soutenir qu’elle est faite plus spécialement pour donner sa vraie place dans la structure subjective à la pulsion de mort qui est « ininterprétable » et qui sert à illustrer de façon remarquable cette invention capitale de Lacan qu’est la sublimation créationniste dont on ne semble pas avoir encore aperçu les implications considérables qu’elle comporte.
Claude DORGEUILLE