La psychose aux temps du coronavirus[1]
ou
Chronique d’une institution psychiatrique en période de pandémie
Nicolas Dissez
Mon intervention constitue un témoignage et une tentative d’envisager les enseignements qui peuvent être retirés de la situation spécifique d’un établissement psychiatrique qui, au moment de la survenue de la pandémie de Covid 19, accueillait plus de 200 patients et employait près de 130 salariés. Il constitue donc une lecture de la situation de cette institution au cours de ce que l’on a appelé, après-coup, la « première vague » de cette épidémie.
I / Mesures d’urgence
Un premier constat, au moment où sont apparus les risques liés à la survenue de cette épidémie dans l’institution, c’est-à-dire au cours de la première quinzaine de mars 2020, a consisté à identifier les écueils liés à la philosophie de travail de l’établissement, celle d’une psychiatrie ouverte permettant aux patients hospitalisés de rencontrer dans un parc arboré chacun des autres patients hospitalisés à temps plein, mais également à chacun des soignants de partager son expérience avec ses collègues des autres unités, au moment des repas en particulier. Ce dispositif constituait la configuration la plus risquée pour la création d’un bouillon de culture favorisant la diffusion d’un virus particulièrement contagieux à l’ensemble des patients comme à l’ensemble du personnel. Dans un premier temps, un souci sanitaire lors de l’arrivée de cette épidémie a donc conduit à proposer un cloisonnement des unités entre elles, à limiter les rencontres entre les patients comme entre les soignants des différentes unités. Cette attitude dictée par des principes hygiénistes séculaires n’en reproduit pas moins une position de maîtrise, elle conduit à se méfier de tout imprévu, de la dimension de la surprise comme de l’inattendu. Elle s’oppose point par point à l’action en France, du mouvement d’humanisation de l’asile par les plus éclairés des aliénistes puis, plus directement encore, par l’intervention de psychanalystes au sein des institutions et enfin par le mouvement de la psychothérapie institutionnelle. Dans ce contexte l’application des décisions et préconisations de port de blouses et de masques, du respect des distances entre chacun, du confinement des patients en chambre seule lors de leur admission, du cloisonnement des unités, de l’interdiction des activités de groupe et de l’évitement des échanges et des rencontres des équipes, n’a pu que heurter chacun puisqu’elle est apparue, sur chaque point, en contradiction avec tous les principes d’une psychiatrie humaniste, soucieuse de favoriser les relations et de mettre au premier plan le registre de l’inattendu au sein de la rencontre singulière avec chaque patient. Dans de nombreux lieux de soins en psychiatrie, il est apparu comme un progrès, au cours des dernières décennies, de favoriser les échanges et les rencontres y compris dans des circonstances informelles, entre les patients et les équipes de soins, comme de limiter progressivement le port des blouses qui instaure une distance souvent inopportune. L’attention à la dimension de la surprise est devenu un enjeu central de la position du praticien[I].
Autrement dit, ces mesures hygiénistes, venant adapter à notre institution la situation d’un confinement décidé au niveau national, transformaient le rapport à l’Autre au sens où cette notion recouvre la fonction d’une altérité porteuse d’humanité. Tous ces principes semblaient, en quelques jours, balayés par la propagation d’une épidémie aux risques mal connus mais chaque jour plus préoccupants.
Il n’est guère nécessaire de revenir dans ce contexte sur les liaisons historiques malheureuses entre une psychiatrie du début du XXème siècle et un discours hygiéniste en tant que discours politique[ii]. Le discours hygiéniste a ses ambigüités, il est l’inventeur d’un certain nombre de progrès comme le « tout à l’égout » – et nous le savons de Lacan : « la civilisation c’est l’égout[iii] » – mais il a également ses dérives et sa pente à l’eugénisme. Il y a eu une psychiatrie hygiéniste dont le principal représentant a été Édouard Toulouse. Il n’est guère difficile dans la situation épidémique actuelle de repérer combien ce discours favorise le retrait sur soi et la crainte du dehors, inévitablement présent chez chacun de nous. Il y a donc un risque indéniable au cours de cette période, celui de l’émergence d’un discours de maîtrise, en particulier dans les institutions, d’un discours qui se soutient de la préservation de la vie pour imposer des règles absolues, un discours de fer qui viendrait en fait imposer une survie – il serait plus juste de dire une « sous vie » – c’est-à-dire sans aléas, sans inattendu, sans ce qui fait le piment essentiel de nos existences. C’est bien ce discours hygiéniste qui, au nom de la défense de la vie, est venu interdire d’accompagner nos ainés dans les EHPAD pour leurs derniers instants ou qui réduit à 5 personnes la présence aux enterrements, autrement dit qui empêche que soit rendu à nos morts un hommage décent. Il y a assurément un recul de la civilisation, dans la toute-puissance de ce discours hygiéniste qui pourtant, dans l’urgence, s’est imposé à nous comme une nécessité.
II / Retour à une position clinique
C’est dans ce contexte, au décours de l’émergence brutale et impérative d’un discours hygiéniste, que je souhaiterais partager quelques remarques cliniques concernant mes patients pendant cette période de crise sanitaire, aussi bien les patients hospitalisés que les patients isolés chez eux, confinés donc, comme nous répétons à l’envie ce terme tombé dans l’oubli depuis des décennies. Il s’agit, dans un contexte caractérisé par un souci de contrôle généralisé et la venue au premier plan d’un discours de maîtrise, de restituer une position clinique privilégiant l’attention à cette dimension de l’altérité en tant qu’elle ne peut se manifester que sur le mode de la surprise. Du fait des particularités de l’institution dont il est ici question, ces remarques concerneront principalement le champ des psychoses.
Le premier étonnement de cette période, disons de mi-mars jusqu’à la mi-avril 2020, a consisté à vérifier qu’elle donnait lieu à peu de décompensations en tant que telles, de la part de nos patients délirants et psychotiques. Ce constat pourrait être rapproché des indications de Freud dans « Considérations actuelles sur la guerre et la mort »[iv] même si celles-ci concernent plutôt le registre des névroses. Globalement au cours de ce premier mois, les décompensations psychiatriques avérées et liées aux informations concernant le risque infectieux sont très limitées. Une seule de mes patientes, lors de son admission, se rendait responsable de la pandémie actuelle de coronavirus, dans un registre typiquement mélancolique. Un autre de mes patients a présenté, à l’annonce de l’impossibilité de sorties et des visites, une décompensation sur le mode d’une perplexité anxieuse avec accès stuporeux sur 24 heures. Ces décompensations n’ont toutefois impliqué que très peu de patients dans l’institution. Les thèmes délirants, eux aussi, concernent peu cette thématique de l’épidémie. Dans l’ensemble, les patients se montrent attentifs aux recommandations qui leur sont faites comme aux évolutions de la situation mais celles-ci ne semblent pas occasionner d’aggravation de leurs situations cliniques. Je constate, dans ce temps initial, que parmi les soignants la survenue de l’épidémie a suscité des attitudes contrastées, qui vont des conduites admirables – certains travaillant bénévolement dans d’autres institutions de soins sur leur temps de repos – mais qui sont aussi sources de tensions institutionnelles et de résurgence de conflits latents. Nos patients psychotiques, eux, s’ils ont pris la situation avec gravité, n’ont, dans la grande majorité des cas, pas vu leurs troubles s’aggraver et, sur le plan psychiatrique à proprement parler, la période est plutôt apaisée.
III / Le confinement, changement des relations à l’Autre
Le terme de confinement, choisi pour désigner la décision politique de protection des populations contre la diffusion du Covid-19, consiste en apparence à cantonner chacun à son lieu d’habitation et semble ainsi opérer sur la registre de l’espace. L’adoption de ce terme largement repris par tout un chacun ne parlant plus que de « la période de confinement » alors qu’il s’agissait avant tout d’une période de diffusion de l’épidémie, mettait en avant la thérapeutique choisie plutôt que la maladie elle-même. Le choix de ce terme masque pourtant que cette méthode ancestrale de lutte contre les épidémies vise d’abord à limiter les contacts à l’intérieur de la population, les relations avec les autres. Le confinement est avant tout mise à distance de l’Autre. Le repérage de l’atteinte à cet Autre permet de lire ses conséquences sur un mode distinct d’une opération portant sur la limitation de l’espace de circulation de chacun. Cette lecture permet d’identifier des effets tout aussi prégnants sur la temporalité vécue. Elle permet également de repérer une transformation des liens entre les personnes, réunies et soudées par le risque invisible d’être touché par une maladie potentiellement porteuse de mort.
Pour envisager dans un premier temps les effets de ce confinement sur notre rapport à l’espace auquel ce terme renvoie étymologiquement, on peut évoquer le registre de la claustration. Si cette conduite constitue un phénomène classique et identifié de la phénoménologie des psychoses[v], il est régulièrement lu, au-delà de ses effets de limitation de circulation d’un patient, comme une modalité de tenir l’Autre à distance, de ses potentialités persécutives en particulier. Dans le Manuel alphabétique de psychiatrie d’Antoine Porot, il est défini comme une « Réclusion que s’imposent certains sujets pour se soustraire aux contacts et aux influences du monde extérieur ». Les effets d’apaisement constatés lors de cette période de confinement pour les patients hôspitalisés comme pour ceux maintenus dans leurs logements peuvent ainsi être rapprochés de cette pratique auto-thérapeutique des psychoses que constitue la claustration. L’Autre, porteur d’hostilité et de persécution est maintenu à distance hors de l’espace où est reclus, cloitré, confiné donc, l’aliéné.
La réaction des patients à l’intérieur de l’institution semble également comparable à celle qui régit ordinairement la situation asilaire : ils considèrent intuitivement (à tort ?) que le danger vient du dehors, que le virus est à l’extérieur et que les murs de l’asile les protègent de tous risques. Ils sont de surcroîts sécurisés par le fait que s’ils allaient mal sur un plan physique les médecins et les infirmières sont immédiatement disponibles dans leur environnement proche. Ce sentiment est également celui d’un patient confiné seul chez lui et qui me dit son sentiment agréable de vivre « comme dans un bunker », combien il lui est agréable d’avoir le sentiment de vivre « en sécurité dans un environnement extérieur hostile ». L’ambiance générale est en effet assez paranoïaque, pourrait-on observer, mais l’expression de cette position comme étant « confortable », voire « agréable » a quelque chose de neuf dans son propos, peut-être permet-elle d’entendre sur un mode inédit pourquoi, dans le registre des paranoïas, Lacan peut continuer à parler de « jouissance », fut-elle de l’Autre.
On pourrait évoquer ici le contexte spécifique de ces patients psychotiques paradoxalement stabilisés à la faveur d’une condamnation par un tribunal à une peine de prison[2], cette incarcération les soulageant d’un certain nombre, voire de la plus grande partie de leurs symptômes. Cette situation bien qu’exceptionnelle, n’interroge-t-elle pas tout un chacun sur ses relations paradoxale à la liberté et sur le coût que celle-ci implique, en termes d’angoisse tout particulièrement ? Marcel Czermak, dans son dernier ouvrage, souligne le soulagement paradoxal lié à la situation de privation de liberté, sur le mode d’un : « Qu’est-ce qu’on était tranquilles à la maison[vi] ! » Pour bon nombre de nos concitoyens, le déconfinement n’a-t-il pas constitué une étape de cette pandémie plus difficile que celle de l’annonce pourtant brutale du confinement ?
Pendant cette période, beaucoup d’indications de mes patients concernent également la dimension du temps, sur un mode apparemment paradoxal : « Tout le monde se plaint du fait que le temps passe lentement, pour moi, le temps passe vite, je me sens protégée » me dit une patiente hospitalisée. « Le temps est laiteux » m’indique un autre patient psychotique, confiné chez lui. Il me souligne dans un premier temps les difficultés qu’il trouve à rythmer ses journées. « J’ai décidé de garder le rythme que j’avais à l’hôpital : l’heure des médicaments, l’heure des repas, l’heure du coucher. » Mais lors d’une consultation suivante il semble s’immerger dans une temporalité infinie qui rappelle un de ses épisodes mélancoliques antérieur : « Avec ce temps infini, j’ai un sentiment d’immortalité, un peu comme quand j’étais hospitalisé. À ce moment-là je pensais qu’on a une vie mais que si on meurt (…) et qu’après on ressuscite, alors on est immortel. À l’hôpital je pensais que j’étais immortel ». Le même patient, dont la famille est juive peu pratiquante, paraît trouver un peu plus tard, une solution moins évocatrice du délire d’immortalité isolé par Jules Cotard. Il m’indique lors d’une consultation ultérieure : « Ce que l’on vit, c’est aussi un temps d’introspection, en fait c’est comme un grand shabbat mais en continu. » Plusieurs patients me font ainsi part d’une certaine satisfaction, d’une certaine jouissance, liée à cette temporalité singulière sans forcément donner lieu à une décompensation psychotique comme telle. Le temps n’est plus ici bordé, scandé et tend à l’infini, la mort elle-même est comme reléguée à l’extérieur, l’immortalité se rapproche.
La perception spécifique de cette temporalité qui perd toute rythmicité nous rappelle que c’est avant tout l’Autre qui vient offrir à notre quotidien la possibilité d’une scansion, d’un avant et d’un après. L’énigme logique mettant en scène trois prisonniers souvent reprise par Jacques Lacan au cours de son enseignement, indique combien c’est l’attention à cet Autre qui permet la découpe temporelle en trois temps : l’instant de voir, le temps pour comprendre et le moment de conclure. Dans cet apologue, c’est grâce à l’attention aux réactions des autres que le temps peut se découper pour se conclure par la sortie, dans la hâte, des prisonniers[vii]. Du fait de cette mise à distance de l’Autre, que prescrit le confinement, le risque existe d’une perte de découpe temporelle avec sa conséquence d’une impossibilité de la sortie de prison. Temporalité sans rythme ni scansion, et confinement qui tend vers la perpétuité, donc.
On pourrait également souligner ce que cette situation de crise particulière implique de changement dans la relation de nos patients psychotiques avec leurs proches et de ce qu’elle instaure d’une situation de plus grande solidarité, y compris pour les patients confinés à leur domicile. Une patiente m’indique ainsi, non sans une note d’humour : « D’habitude quand c’est la fin du monde, je suis toute seule à m’angoisser. Là, j’ai l’impression de partager cette inquiétude, c’est moins difficile. » « C’est un temps positif m’indique un autre patient, on est moins pressurisé sur le plan social, il y a une relance de la solidarité, on vit une bonne période. Le fait qu’on ait un éloignement physique ça apaise les relations sociales, les gens sont plus à votre écoute, ils vous appellent pour savoir comment ça va. » Puis il ajoute : « Quand je ne suis pas confiné, ma famille ne m’appelle pas tous les jours comme en ce moment pour me demander : Comment tu fais pour t‘occuper ? » Cette introduction à un registre de solidarité spécifique se manifeste également quand plusieurs patients s’inquiètent au téléphone de mon sort de « non-confiné » et des risques de contagion que je peux encourir. Ils paraissent ainsi pointer un rapport à la mort, autrement dit à un réel, en face duquel chacun de nous ne peut que se montrer faillible. Cette interpellation nous met ici dans une position spécifique : non pas de semblable mais de prochains, de Nebenmensch, pour reprendre le terme introduit par Freud dans l’Esquisse d’une psychologie scientifique[viii]. On sait que Freud, dans cet écrit précoce et non publié, souligne l’enjeu de la rencontre entre l’enfant en état de détresse (Hilflosigkeit) et le prochain, au sens du plus proche, (Nebenmensch) en tant qu’il est celui qui saurait entendre cet appel. Il y a ainsi une dimension de proximité paradoxale induite par la situation épidémique. Proximité commune avec la dimension de la mort qui induit un ton particulier des entretiens et peut, peut-être, expliquer que certains patients, habituellement dans une difficulté particulière à prendre la parole au cours des séances, se montrent plus prolixes lors de ces consultations téléphoniques. La clinique des psychoses, lue comme une décomposition des éléments structuraux du langage, conduit à une telle possibilité pour le praticien de venir partager avec son patient une position commune à l’égard du langage. On trouvera dans les travaux récents de l’École Psychanalytique de Sainte-Anne fondée par Marcel Czermak[ix] une illustration de la valeur de cette relation de Nebenmensch dans l’abord des psychoses. La lecture clinique d’une patiente de Raphaël Tyranowski concernant plus particulièrement la clinique de la dépersonnalisation[x], témoigne d’un effort de recherche récent dans cette direction.
Beaucoup de patients, dans cette période, témoignent de ce que la situation particulière de crise que nous vivons sollicite chez eux un registre de créativité spécifique. Plusieurs d’entre eux à l’hôpital se sont ainsi mis à écrire, à partager leurs écrits ou à afficher dans l’unité où ils sont admis, de nombreux tableaux. Un patient délirant a écrit « le premier jet » d’un roman dans lequel je figure, au titre d’un personnage. « C’est la période la plus heureuse de ma vie » me dit-il. L’une de mes patientes, là aussi dans la première période de cette crise, a proposé de mettre en scène une pièce de théâtre dans le cadre, inhabituel pour un tel évènement, de la salle commune de l’unité. Assurant qu’elle avait écrit un spectacle qui respectait scrupuleusement les règles sanitaires et la nécessité pour chacun de se tenir à un mètre de distance des autres comédiens, elle a mis en scène une salle d’attente aux enjeux manifestement transférentiels, puisque chacun des patients qui y attendent leur médecin se rend compte progressivement qu’ils ont tous un rendez-vous de consultation prévu au même horaire. Ces précautions de mise en scène n’ont pas empêché l’aide-soignante qui avait filmé la scène de tomber malade la semaine suivante… Beaucoup d’échanges de poésie ont circulé par mail dans la population générale en ces temps de confinement, pointant, chez chacun, cette attente d’un espace de créativité. Peut-être peut-on rapprocher cet intérêt pour la créativité dans une période marquée par l’annonce quotidienne des morts liés à l’épidémie, de l’articulation de la sublimation à l’horreur de « La chose » évoquée par Lacan dans le séminaire sur l’Éthique de la psychanalyse[xi].
Au terme de ces remarques trop elliptiques, on entendra ainsi la question qui peut être la mienne : le psychanalyste en temps de crise sanitaire mais aussi plongé dans la vie de l’institution, est-ce celui qui entreprend de sauver des vies, de promouvoir les gestes barrières ou bien est-ce celui qui vient dénoncer la volonté de maîtrise de ce discours hygiéniste pour promouvoir le registre de l’inattendu, de la surprise, de la nouveauté ? À le formuler ainsi, chacune de ces deux positions me sembleraient presque confortables, assises sur leurs convictions quand c’est plutôt l’incertitude et l’interrogation qui prédominent dans le contexte que j’ai essayé de vous retracer. Je ne saurais donc apporter de conclusion à ces remarques saisies au fil des jours sinon pour indiquer la position nécessairement tiraillée, inconfortable donc, dans laquelle je me suis trouvé, reprenant par nécessité le discours hygiéniste, mais restant attentif, voire privilégiant progressivement la réinstauration de ce que Jean Oury appelle « le précaire[xii] » dans la vie institutionnelle – à rapprocher probablement de ce que Christiane Lacôte-Destribats appelle « le contingent[xiii] » dans le cadre de la cure. Sans que cela constitue une conclusion, je ne peux donc que constater que la position qui fût la mienne dans cette période, bien que soutenue par la psychanalyse, ne me préserve en rien d’un tiraillement, voire d’un écartèlement, entre ces deux positions.